Près de 300 Québécois ayant reçu l'aide médicale à mourir en six mois. Une hausse de la demande de 1400% dans une région, d'autres où seulement une demande sur trois est acceptée. Les plus récents chiffres publiés la semaine dernière ont fait grand bruit, mais ils ne nous disent qu'une chose : la nécessité de mieux documenter les soins de fin de vie, en particulier les demandes d'aide médicale à mourir refusées et la disponibilité des soins palliatifs.

Où en est le Québec après un an d'aide médicale à mourir? En apprentissage.

Il faut avoir le courage de le reconnaître, et prendre les moyens de s'améliorer.

Les chiffres disponibles brossent un portrait très impressionniste de la réalité.

Au 10 décembre dernier, un an après l'entrée en vigueur de la loi, 461 Québécois ont reçu l'aide médicale à mourir, dont 295 dans les six derniers mois, montrent les données colligées par Radio-Canada. L'augmentation d'un semestre à l'autre peut sembler importante, mais elle n'a rien d'étonnant pour une procédure nouvelle en train de se mettre en place.

Une prudence encore plus grande s'impose devant les portraits régionaux.

1400 %

C'est l'augmentation des demandes d'aide à mourir enregistrée entre la première et la seconde moitié de l'année au CIUSSS* du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Que se passe-t-il là? Pas grand-chose : le CIUSSS * a reçu une seule demande de décembre 2015 à juin 2016, et 15 les six mois suivants : +1400%.

Même scénario dans les deux autres régions ayant enregistré un « bond » de plus de 200 %. Le Bas-Saint-Laurent avait reçu cinq demandes durant les six premiers mois, Chaudière-Appalaches en avait eu six. Bref, rien d'affolant, ni même de spectaculaire.

Le pourcentage de demandes acceptées n'est guère plus éclairant.

Seulement le tiers des patients ayant réclamé l'aide à mourir l'ont reçue dans les CIUSSS du Nord-de-l'Île-de-Montréal et du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Dans celui de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal, c'est encore moins : à peine plus du quart.

Ces malades ont-ils été lésés? Ou étaient-ils simplement mal informés des critères? Les motifs consignés actuellement amènent plus de questions que de réponses.

Les refus sont-ils justifiés? Les patients jugés inaptes à consentir en sont-ils arrivés là à cause de la lenteur du processus? Et ceux qui se sont éteints en cours d'évaluation? Tant qu'on n'examinera pas ces cas avec la même rigueur que ceux où l'aide à mourir a été administrée, on n'en saura rien. Le Collège des médecins et d'autres avaient d'ailleurs recommandé de le faire. On réalise aujourd'hui la nécessité de la chose.

En révisant seulement les demandes qui sont allées de l'avant, on surveille un seul type d'abus, celui où l'aide n'aurait pas dû être administrée. Il ne semble pas y en avoir jusqu'ici. Mais priver des malades d'une aide à laquelle ils sont admissibles, par idéologie ou manque de ressources, serait tout aussi abusif. Il faut vérifier si cela se produit pour pouvoir corriger la situation.

Le ministre de la Santé s'est montré ouvert à une évaluation des refus, mais il faudra davantage. Les membres de la Commission sur les soins de fin de vie en ont déjà plein les bras avec la révision des cas où l'aide a été administrée. Sans commande claire ni ressources supplémentaires, ils ne se précipiteront pas pour alourdir leur mandat.

Il faut aussi s'intéresser aux soins palliatifs. Pas comme solution de rechange à l'aide à mourir, comme on l'entend trop souvent, mais en tant que service essentiel dont a toujours déploré l'insuffisance. Les ratios de lits recommandés ont été atteints, a indiqué récemment le ministre Barrette. Cela suffit-il? Les malades qui ont besoin de soins palliatifs y ont-ils tous accès ? Aussi incroyable que cela puisse paraître, ce n'est pas mesuré. Il va falloir trouver les moyens de le faire.

* CIUSSS : Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux

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