Le candidat Trump a promis des changements radicaux sur le front du commerce extérieur et de la fiscalité. Il a toutefois donné bien peu de détails sur leur mise en oeuvre. Son programme économique a laissé beaucoup d'espaces blancs. La façon dont le président Trump les remplira sera déterminante pour les exportations canadiennes.

On pense tout de suite à l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), que le candidat républicain a menacé de renier s'il ne parvient pas à le renégocier à l'avantage des États-Unis. Si ce scénario catastrophe se réalise, est-ce que le précédent Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, qui a été suspendu dans le cadre de l'ALENA, prendrait automatiquement le relai ? On l'espère, mais on n'a aucune indication à cet égard.

Ce président qui a promis de rapatrier des emplois américains devrait essentiellement viser le Mexique, puisque c'est surtout chez ce troisième amigo que les entreprises américaines et canadiennes ont transféré leur production. Mais que vaut une telle évidence aux yeux d'un politicien qui s'est fait élire en se fichant aussi éperdument des faits ? C'est un immense point d'interrogation qui empêche d'y voir clair dans de nombreux dossiers.

Donnons cependant à Donald Trump ce qui lui revient.

Qu'il s'agisse de jouer le magnat de l'immobilier, l'animateur-vedette ou le candidat républicain hors norme, cet homme a toujours su s'approprier le rôle.

Dans son discours de la victoire, hier, il a tendu la main à « toutes les autres nations désireuses de s'entendre », promis que les États-Unis se montreraient équitables avec tous, et assuré que son gouvernement ne serait pas en quête de conflits, mais de partenariats et de terrains d'entente. Bref, il a su adopter l'attitude et le ton rassembleurs qu'on attend d'un président désigné. Espérons qu'il les conservera dans l'exercice de ses fonctions.

Les États-Unis ne sont pas un petit concours de Miss Univers. Le nouveau patron ne pourra pas jouer les propriétaires, même avec un Sénat et une Chambre des représentants contrôlés par les républicains.

Un chiffre qui en dit long : aucun PDG des 100 plus grandes sociétés américaines n'a donné d'argent à la campagne de Trump. Zéro, alors qu'en 2012, près du tiers de ce club sélect avait soutenu Mitt Romney. Et ce n'est pas seulement pour cause de discours haineux sur les femmes, les Mexicains ou les musulmans.

Les tarifs douaniers de 35 % sur les importations du Mexique et de 45 % sur celles de la Chine évoqués durant la course ne feraient pas que gonfler les prix à la consommation. Ce serait un cauchemar pour les usines qui importent des composants et des matières premières, notamment dans l'automobile. Des milliers d'emplois sur le sol américain sont en jeu. Et si le lobbyisme ne suffit pas, ces entreprises le dénonceront en public. De quoi ramener le nouveau venu à des dispositions libre-échangistes plus conformes à la tradition républicaine.

Pour ce qui est du conflit du bois d'oeuvre et du Partenariat transpacifique (PTP), par contre, il est clair que l'élection de Donald Trump n'aide en rien nos affaires.

Si les deux candidats à la présidence avaient adopté un discours protectionniste, le pragmatisme d'Hillary Clinton permettait d'espérer un peu plus de bonne volonté dans ces deux dossiers commerciaux déterminants pour le Canada.

Reste à voir ce qu'il adviendra des stimulus économiques annoncés en campagne.

Les réductions d'impôts massives promises alourdiraient la dette et grèveraient la croissance à long terme, a estimé le Committee for a Responsible Federal Budget. À court terme, soit l'an prochain, ces mesures pourraient toutefois doper la croissance de 1,7 point de pourcentage, a reconnu l'organisation non partisane. Et ça ne tient pas compte des investissements en infrastructures - jusqu'à 1000 milliards de dollars sur 10 ans en utilisant les fonds publics comme levier pour attirer du financement privé, si l'on en croit Trump.

Le Canada, qui réalise les trois quarts de ses exportations aux États-Unis, pourrait en profiter - si ce n'est directement dans les infrastructures, au moins indirectement, grâce aux dépenses de consommation accrues des travailleurs. Ce n'est pas l'idéal, mais dans ce climat d'incertitude, un rayon d'espoir n'est pas à dédaigner.

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