L'assassinat d'une députée britannique par un concitoyen se réclamant d'un groupe d'extrême droite portera-t-il un coup fatal à la campagne pro-Brexit ? Chose certaine, le discours haineux d'une partie de ce camp est devenu impossible à ignorer. Espérons que les indécis et ceux qui veulent quitter l'Europe pour des motifs purement économiques y penseront à deux fois avant de s'associer à ces positions racistes.

« La haine n'a pas de croyance, de race ou de religion. Elle est toxique », a déclaré le mari de Jo Cox dans un texte remarquable publié dans la foulée de l'attentat, jeudi. Effectivement, on en sait encore bien peu sur l'homme qui a été arrêté après avoir attaqué la députée travailliste de 41 ans, d'abord en lui tirant dessus puis en lui donnant des coups de couteau.

D'après les médias britanniques, l'homme de 52 ans habitait seul dans les environs, où il jardinait bénévolement pour des voisins. Le suspect, qui a un historique de maladie mentale, aurait acheté du matériel à des groupes d'extrême droite. Et surtout, des témoins affirment l'avoir entendu crier « Britain First » pendant l'agression.

Britain First est un groupe d'extrême droite qui se dit chrétien. Son chef a dénoncé le meurtre et s'en est dissocié sans réserve.

De fait, il est bien possible que l'assaillant n'ait aucun lien avec cette organisation. On comprend toutefois que celle-ci puisse ne pas attirer uniquement des gens sains d'esprit.

Le mouvement se défend d'être raciste tout en se disant opposé à « toute immigration de masse, sans égard à sa provenance ». Dans les faits, il s'est surtout fait remarquer par ses actions contre des musulmans - manifestations à l'intérieur et aux abords de mosquées, campagne contre les élus musulmans, etc.

Si Britain First demeure marginal sur l'échiquier politique, il n'est pas le seul à faire vibrer la corde xénophobe pour promouvoir le Brexit. Quelques heures avant l'assassinat de Jo Cox, le député européen Nigel Farage, qui dirige le Parti pour l'indépendance du Royaume-Uni (UKIP), a dévoilé une affiche montrant une colonne de réfugiés et appelant l'électorat à se « libérer de l'UE [Union européenne] » et à « reprendre le contrôle de nos frontières ».

L'affiche a été dénoncée de toutes parts. Un leader syndical a même porté plainte à la police pour « tentative d'inciter à la haine raciale ». N'empêche, son lancement en grande pompe donne une idée du climat qui règne à moins d'une semaine du vote. Le discours d'une partie des militants du Brexit a toujours eu des relents un peu nauséabonds, sauf que là, on est carrément dans le refoulement d'égouts.

La campagne référendaire est suspendue jusqu'à demain, mais les électeurs n'auront pas oublié les derniers jours. Il sera difficile de les convaincre de rejeter l'Europe pour des motifs purement économiques : le camp du Brexit a bien d'autres objectifs désormais impossibles à ignorer. Chaque Britannique doit se demander s'il souhaite vraiment les appuyer.

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