L'état de santé et les habitudes de vie des Montréalais sont très différents d'un quartier à l'autre, montre une grande enquête rendue publique hier. Utilisés intelligemment, ces résultats pourraient améliorer considérablement l'utilisation des ressources.

L'étude TOPO est la plus détaillée jamais réalisée ici. Voulant aller au-delà des généralités habituelles, la Direction de la santé publique est allée voir ce qui se passe dans chacun des territoires administratifs. Près de 11 000 résidants ont ainsi été interrogés dans les 12 Centres de santé et de services sociaux (CSSS) de l'île.

Les premiers chiffres dévoilés hier offrent un portrait très contrasté. Le CSSS Jeanne-Mance, qui couvre une partie du Plateau et du centre-ville, affiche le pire taux de tabagisme et de consommation excessive d'alcool. Mais il a aussi le plus bas taux de sédentarité et, ceci expliquant peut-être cela, la plus faible proportion d'adultes obèses.

À l'inverse, la Pointe-de-l'Île est dans la moyenne pour l'alcool et le tabac, mais c'est le territoire qui compte le plus d'adultes obèses et l'un de ceux où la sédentarité est la plus répandue. Ce CSSS détient d'ailleurs le triste record des morts prématurées attribuables aux maladies chroniques, ex aequo avec le CSSS de Saint-Léonard et Saint-Michel (75%, contre 70% en moyenne à Montréal).

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On voit tout de suite l'usage qu'on pourrait faire de telles données. Dans ce système de santé à bout de souffle, où la prévention est traitée en parent pauvre, on a intérêt à faire des choix si l'on veut des résultats. Par exemple, les deux CSSS où la consommation excessive d'alcool est la moins répandue (Bordeaux-Cartierville-Saint-Laurent et Saint-Léonard et Saint-Michel) pourraient prioriser d'autres problèmes.

Les villes devraient aussi tenir compte de ces informations. Les quartiers où les taux de sédentarité et d'obésité sont élevés ont souvent des installations sportives déficientes et des rues peu sécuritaires. Les élus devraient investir là en priorité, et s'abstenir de couper bêtement dans l'horaire des piscines pour boucler leur budget.

Reste à voir à quel point l'agence de santé régionale tiendra compte de ses propres chiffres dans l'attribution des ressources - en particulier les médecins de famille. Dans certains quartiers, près d'un résidant sur deux n'en a pas. Si vous avez au moins 70 ans ou êtes enceinte, avez une maladie chronique ou avez besoin de suivi au sortir de l'hôpital, votre CSSS vous aidera, dit le site de l'agence. Sinon? On vous suggère de demander à votre entourage ou au médecin de la clinique sans rendez-vous. Vous n'y auriez pas pensé, n'est-ce pas?

S'occuper des cas lourds, c'est bien, mais négliger les autres est un mauvais calcul. Ceux-là vont endurer leurs maux jusqu'à ce qu'ils deviennent intolérables, au risque de développer un problème plus grave, et plus coûteux à traiter. Une donnée depuis trop longtemps négligée, dont il faudrait aussi apprendre à tenir compte.

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