Revenu Québec est-elle au-dessus des lois? La question va se poser dans le cadre d'un recours collectif intenté par un citoyen qui a vu son remboursement d'impôt intercepté, même s'il s'était entendu avec ses créanciers.

Au printemps 2010, Francis Brisebois a fait une proposition de consommateur en vertu de la loi fédérale sur la faillite et l'insolvabilité. Plutôt que de faire faillite, il s'est engagé à verser 200$ par mois pendant 60 mois, pour un total de 12 000$.

Une telle proposition, acceptée par la majorité de ses créanciers et approuvée par un tribunal, acquiert une force exécutoire. Tout geste unilatéral ensuite posé par l'une des parties est contraire à l'ordre public, a souligné la juge Michèle Lacroix en autorisant le recours collectif en Cour supérieure, mardi dernier.

L'Agence du revenu du Québec, de toute évidence, voit les choses d'un autre oeil. Lorsqu'elle a constaté, en avril 2012, que M. Brisebois avait droit à plus de 3500$ de remboursement d'impôt, elle a retenu l'argent.

Selon le Conseil des syndics de faillites du Québec, c'est loin d'être un cas isolé. Beaucoup de Québécois qui avaient conclu des arrangements avec leurs créanciers au cours des dernières années ont eu des mauvaises surprises du genre.

On comprend que le fisc intercepte un remboursement quand il n'a pas d'autre moyen d'éponger la dette d'un contribuable. La loi québécoise sur l'administration fiscale l'y autorise. Mais lorsqu'il reçoit déjà des paiements dans le cadre d'une proposition de consommateur, il ne devrait pas profiter, en plus, de son accès privilégié aux remboursements d'impôt.

En interceptant ces sommes dues au contribuable (parce que celui-ci a payé trop d'impôt dans l'année, qu'il a droit à une prestation pour enfant ou toute autre raison), le fisc le prive de liquidités sur lesquelles il est en droit de compter. C'est injuste envers ce particulier et, potentiellement, envers ses autres créanciers - si les sommes manquantes empêchent ce citoyen de faire les paiements prévus et le forcent à faire faillite.

Revenu Canada s'est d'ailleurs fait taper sur les doigts en Cour d'appel de l'Ontario pour une manoeuvre semblable. En calculant des acomptes provisionnels sans tenir compte d'une proposition concordataire approuvée par le tribunal, l'agence avait recouvré une partie de sa créance au taux intégral de 100 cents par dollar, s'octroyant ainsi un privilège indu sur les autres créanciers ordinaires non garantis. Le fisc fédéral n'exerce plus de compensation de cette nature, note l'avocat de M. Brisebois.

Le recours collectif pourrait être entendu l'an prochain, au plus tôt. En attendant, Revenu Québec devrait lire le jugement ontarien, rendu il y a plus de 10 ans, et adopter un comportement plus civilisé. Lorsqu'un citoyen se donne la peine de négocier un remboursement plutôt que de faire faillite, le fisc devrait se contenter des paiements convenus, comme les autres créanciers ordinaires.

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