Le déluge d'amendes et d'enquêtes qui s'abattent sur la plus grosse banque américaine nous rappelle à quel point l'écheveau à l'origine de la crise de 2008 est long et ardu à démêler. Une reddition de comptes indispensable, même si elle est imparfaite.

Cinq ans après la crise financière, on se demande si on en verra le bout. Une agence fédérale américaine réclame six milliards de dollars à la JPMorgan Chase pour les pertes subies sur des titres hypothécaires vendus à Fannie Mae et Freddy Mac, révélait le Financial Times mardi. Le scandale des dérivés orchestré par le bureau londonien de la banque pourrait lui coûter jusqu'à 600 millions de dollars en pénalités, rapportait de son côté le Wall Street Journal. Et ce ne sont que les plus récents développements.

Dans les derniers résultats trimestriels publiés au début août, la note sur les litiges en cours occupe neuf pages bien tassées. La réserve pour litiges a été augmentée de 800 millions de dollars, et atteint désormais 6,8 milliards. Trois semaines plus tard, l'un des deux patrons des affaires juridiques annonçait qu'il quittait le navire pour une plus petite banque.

L'histoire de la «baleine de Londres» (un négociant dont les paris sur les dérivés ont causé plus de six milliards de pertes), qui a germé bien après la crise et a d'abord été qualifié de «tempête dans un verre d'eau» par le grand patron de JPMorgan, n'a pas aidé, renforçant plutôt l'impression que rien n'avait changé.

JPMorgan a rectifié le tir depuis, annonçant que la conformité et les contrôles internes seraient désormais une priorité. Elle n'en est pas moins intraitable dans ses négociations avec les multiples autorités règlementaires lancées à ses trousses. Sa position serait à des milliards de dollars des indemnités réclamées pour les pertes de Freddie et Fannie.

Il est vrai que la facture inclut des titres émis par Bear Stearns et Washington Mutual avant que JPMorgan n'absorbe ces deux institutions. Et que ces rachats, en pleine crise financière, faisaient drôlement l'affaire de Washington. Les régulateurs en tiendront peut-être compte dans leurs calculs, mais ils ne peuvent pas non plus effacer toute l'ardoise. Déjà que les amendes sont presque toujours versées sans la moindre reconnaissance de responsabilité...

Il y a d'ailleurs lieu de s'interroger sur l'efficacité de ces pénalités. Finiront-elles par avoir l'effet dissuasif recherché, ou sont-elles considérées, par les grandes banques américaines, comme de simples dépenses d'exploitation?

On ose croire que la publicité négative et la disgrâce politique qui accompagnent ces enquêtes finiront par instiller un minimum de décence au secteur. Davantage, à tout le moins, que le laxisme total qui prévalait avant la crise. Mais vu le temps qu'il faut pour mettre au jour de telles affaires, il nous faudra des années avant de pouvoir affirmer, sans crainte d'être contredit par de nouveaux scandales, que les mentalités ont un peu évolué.

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