À l'impossible, nul n'est tenu. Le coroner québécois chargé d'enquêter sur la disparition d'Arturo Gatti s'avoue incapable de tirer des conclusions définitives sur le décès du célèbre boxeur. Un rappel de l'importance de conserver les lieux intacts lors d'une mort suspecte.

«Il est possible de soulever des doutes sur les méthodes employées par les enquêteurs brésiliens lors de l'examen de l'endroit où est survenu le décès d'Arturo Gatti et le soussigné estime que cela ne lui permet pas de conclure de façon certaine sur les circonstances du décès», conclut le Dr Jean Brochu dans son rapport publié hier. Le coroner écrit avec des gants blancs, mais les faits qu'il évoque en disent long sur la négligence de la police brésilienne. À commencer par cet enquêteur qui, lui, ne portait pas de gants pour manipuler des pièces à conviction. Et que dire de cette courroie de sac à main que M. Gatti aurait utilisée pour se pendre? C'est du moins ce que conclut l'enquête locale. Le hic, c'est qu'elle dit aussi que la courroie a cassé en cinq secondes lors d'une expertise avec un poids de 35 kg! Ladite courroie a par ailleurs été trouvée à environ 70 cm de son cou, trop loin pour avoir été simplement projetée par la chute du corps, pense le coroner Brochu. Quelqu'un l'a-t-il déplacée? Encore là, pas de réponse. On sait par contre que pas mal de gens ont circulé sur les lieux avant l'arrivée de la police. Que les civils n'y aient pas pensé peut se comprendre - quoiqu'au nombre de scènes médico-légales diffusées sur les écrans, on s'attendrait à ce que les gens aient le réflexe de ne toucher à rien. On s'étonne cependant que les enquêteurs aient été si peu rigoureux. Plusieurs photos, par exemple, ne correspondent pas aux notes du rapport. Est-ce le taux d'homicide élevé du Brésil (12 fois celui du Canada) qui banalise les morts suspectes, et n'incite pas à les traiter avec autant de précautions? Le Bureau du coroner doit faire enquête lorsque le corps d'une personne décédée de façon violente est rapatrié au Québec. Mais comme on le voit, l'exercice fondé sur des documents étrangers peut s'avérer extrêmement frustrant. Déjà, les pathologistes montréalais qui ont fait la deuxième autopsie, 20 jours après le décès, on dû travailler sur un corps altéré, où il manquait une partie du cerveau et où le liquide d'embaumement empêchait d'établir le taux d'alcool. Ils en ont cependant assez vu pour conclure à une asphyxie par compression du cou, ce qu'endosse le coroner Brochu. Et si celui-ci n'endosse pas la thèse brésilienne du suicide par pendaison, il admet ne pas avoir d'élément assez fort pour la rejeter non plus. On ne saura donc jamais vraiment ce qui s'est passé dans la nuit du 10 au 11 juillet 2009 dans cet appartement d'Ipojuca, dans l'État de Pernambuco. Seule certitude, ce fut une fin très, très triste pour l'ex-champion de boxe de 37 ans.

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