Jusqu'à quel point doit-on ouvrir notre secteur des télécommunications aux étrangers? Le gouvernement Harper pose la question aux Canadiens. Attention: la formule retenue, quelle qu'elle soit, devra d'abord répondre aux intérêts des clients.

Jusqu'à quel point doit-on ouvrir notre secteur des télécommunications aux étrangers? Le gouvernement Harper pose la question aux Canadiens. Attention: la formule retenue, quelle qu'elle soit, devra d'abord répondre aux intérêts des clients.

«Le besoin d'effectuer une réforme est incontournable», a prévenu le ministre Tony Clement dans un discours devant l'industrie la semaine dernière. L'intention avait déjà été annoncée dans le discours du Trône et le dernier budget. Elle vient d'être réitérée dans la réponse faite par le Parti conservateur au tout nouveau rapport du Comité permanent de l'industrie.

Bref, la volonté y est. Sauf que rien ne garantit qu'elle pourra se concrétiser. Les précédentes tentatives de réforme ont toutes avorté pour cause de déclenchement d'élections. Et ce n'est pas le genre de sujet sur lequel on s'entend rapidement.

On sait déjà qu'aucun des trois scénarios mis sur la table par le ministre de l'Industrie ne fera l'unanimité.

Supprimer complètement les restrictions à la propriété étrangère des télécommunications marquerait une rupture brutale, sans garantir une offre plus concurrentielle. L'accès accru à des capitaux extérieurs donnerait un coup de pouce aux nouveaux fournisseurs, mais ne changerait pas nécessairement leur rapport de force avec les entreprises dominantes, puisque celles-ci auraient aussi accès à ces nouvelles sources de financement. Sans compter que BCE, Telus et Rogers deviendraient des cibles d'acquisition de choix. La perspective sourira à bien des actionnaires, mais elle risque aussi de nous replonger dans un psychodrame sur le rachat de «joyaux canadiens» par des étrangers.

Permettre à des non-Canadiens de détenir jusqu'à 49% des actions avec droit de vote d'une entreprise télécom (au lieu de 20% actuellement) constituerait un changement moins dramatique, mais qui, encore une fois, ne garantirait pas un rééquilibre des forces. Le fait que ce scénario englobe aussi la radiodiffusion ne joue pas non plus en sa faveur. Tony Clement a beau jurer de ne pas nuire à la culture ou au contenu canadien, mieux vaudrait laisser la télé et la radio en dehors de cette réforme destinée, rappelons-le, à améliorer la dynamique des télécoms.

La dernière option (lever les restrictions pour les entreprises qui contrôlent moins de 10% du marché seulement) ne plaira évidemment pas aux fournisseurs dominants. Soutenir un réseau coûte tellement cher que même des sociétés bien établies comme Bell ou Rogers aimeraient attirer davantage de capitaux étrangers. Mais y a-t-il d'autres moyens d'améliorer les chances de survie des nouveaux fournisseurs, en particulier dans le cellulaire? L'épisode Fido nous a montré à quel point notre marché est difficile pour les petits derniers. Or, si on veut que l'offre aux clients s'améliore, autant pour les consommateurs que pour les entreprises, il faut intensifier la concurrence. Autrement, ce bel effort d'ouverture n'aura servi qu'à l'industrie.

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