Québec sera, d'ici quelques mois, le premier gouvernement nord-américain à financer les traitements de reproduction assistée, y compris la coûteuse fertilisation in vitro (FIV). Une bonne nouvelle pour les citoyens désireux de recevoir ces services. Pour la santé, c'est une autre histoire. L'implantation de ce nouveau programme, telle qu'on nous la présente aujourd'hui, menace les services existants. C'est inacceptable.

Les traitements seront accessibles sans frais avant l'été, promet le ministre Bolduc. Mais à quel prix? Les coûts, estimés à 32 millions pour la première année, augmenteront avec la demande et se stabiliseront autour de 80 millions par an, calcule le ministère. On peut se demander si c'est le meilleur usage à faire de cet argent en santé, surtout avec tout ce qui manque en ce moment. Hélas, c'est un peu tard. Les trois principaux partis en ayant fait une promesse électorale, ce n'est pas l'opposition qui va reprocher aux libéraux d'aller de l'avant.

 

Ce n'est pas une raison pour céder à la pensée magique comptable. Québec estime que le programme va s'autofinancer parce qu'il limite le nombre d'embryons implantés - ce qui devrait réduire la fréquence des grossesses multiples et les frais médicaux qui en découlent. De fait, on s'attend à ce que le taux de grossesses multiples diminue. Cependant, rien ne prouve que ça suffira à absorber les coûts des nouveaux services.

Le gouvernement Charest doit être conséquent. Il a voulu gagner des points auprès de l'électorat? Qu'il donne au ministère de la Santé les moyens de remplir sa promesse. Autrement le ministère devra déshabiller un de ses programmes pour habiller celui-là, alors qu'aucun n'a d'épaisseur en trop.

Il faut voir aussi comment l'argent est dépensé. Que Québec accorde 2 millions de plus au Centre de reproduction McGill pour augmenter son volume d'activité, ça se défend. Qu'il compte sur le CHUM parce qu'il sera bientôt prêt à offrir ce service, passe encore. Mais pourquoi demander à d'autres centres hospitaliers universitaires, comme Québec et Sherbrooke, de se doter de cette spécialité? Ils manquent de travail? On a de l'argent à dilapider en infrastructures et en équipement? C'est pour la formation et la recherche, nous dit-on au bureau du ministre. Voyons! Qu'on concentre ces activités dans les CHU montréalais et qu'on laisse le privé investir pour répondre à la demande de traitements excédentaire.

Dans ce débat éminemment émotif, l'ex-ministre de la Santé, Philippe Couillard, et la Commission de l'éthique de la science et de la technologie sont pratiquement les seuls à avoir osé dire qu'une société doit faire des choix et ne peut répondre à tous les besoins. Québec ne les a pas écoutés? Qu'il assume. Les autres patients n'ont pas à payer pour l'ajout de la procréation assistée au panier des services assurés.

 

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