Associer les mots sécurité et enfants dans la même phrase fausse-t-il le jugement? C'est l'impression que donnent la Commission de scolaire de Montréal (CSDM) et la ministre de l'Éducation. Avant de s'adresser à une classe, un écrivain ou un artiste devra désormais faire vérifier ses antécédents judiciaires. À ses frais. Même si un enseignant est présent à la rencontre, qui n'excède pas une heure. Un test d'urine avec ça?

Cela fait trois ans que la Loi sur l'instruction publique demande aux commissions scolaires de vérifier les antécédents judiciaires de ceux qui oeuvrent auprès d'élèves mineurs ou sont en contact régulier avec eux. La CSDM est la première à le faire avec un tel zèle.

 

Qu'elle vérifie les antécédents des enseignants, des stagiaires et des bénévoles comme elle le fait déjà, c'est légitime. Ces travailleurs sont souvent seuls avec les jeunes et peuvent développer une relation étroite avec eux. Mais un écrivain qui rencontre une classe durant 45 à 60 minutes, en présence de l'enseignant? Il faut être doué d'une imagination très fertile pour croire qu'il puisse mettre les élèves en danger.

La ministre de l'Éducation n'y voit pourtant rien à redire. C'est dans la loi et il est question de la sécurité des enfants, nous a-t-elle dit en substance.

La CSDM a envoyé cette directive à des écrivains inscrits au Répertoire de ressources culture-éducation, qui comprend également des artistes et des organismes culturels. Pour y figurer, il faut avoir été approuvé par un jury. C'est dans ce répertoire que les écoles doivent puiser pour que les cachets de leurs invités soient couverts par le programme La culture à l'école, financé par Québec.

Un auteur reçoit 325$ pour rencontrer trois ou quatre classes dans une journée. S'il doit débourser 80$ pour faire vérifier ses antécédents par l'une des firmes agréées par la CSDM, c'est plus de 20% de son premier cachet qui y passera. C'est inacceptable.

Il faut arrêter de se conter des peurs et regarder la réalité en face. Un bref passage en classe en présence de l'enseignant ne permet tout simplement pas de mettre pas en danger la sécurité des jeunes. La seule chose qui pourrait être à risque, c'est l'image de la commission scolaire, si jamais le public apprenait que l'un de ces visiteurs traîne un passé douteux. Si la CSDM est terrorisée par une telle perspective, qu'elle fasse vérifier les antécédents de tous ceux qui se pointent en classe. Mais qu'elle acquitte la facture, comme elle le fait déjà pour ses enseignants, ses stagiaires et ses bénévoles. Surtout que dans le cas des écrivains et des artistes, c'est elle, et non les élèves, qu'elle cherche à protéger.

 

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