«La réforme des soins de santé ne peut pas attendre, ne doit pas attendre et n'attendra pas une année de plus», a martelé Barack Obama devant le Congrès la semaine dernière. Le président américain expliquera demain comment il compte s'y prendre pour assurer une couverture minimale à chacun de ses concitoyens. Le défi est colossal, mais le moment n'a jamais été aussi favorable pour s'y attaquer.

Les assureurs privés, qui ont si bien réussi à faire dérailler la première tentative de l'administration Clinton, doivent désormais manoeuvrer avec plus de subtilité. Quelque 46 millions d'Américains n'ont aucune couverture et 25 millions ne peuvent pas se payer de protection suffisante. Un problème de santé relativement mineur suffit à mettre leurs finances en péril. Plusieurs risquent d'ailleurs la faillite à cause de factures d'hôpitaux impayées. Sans compter les milliers de nouveaux chômeurs qui découvrent chaque semaine à quel point il est coûteux et difficile de s'assurer par soi-même. Bref, le moment est mal choisi pour défendre le statu quo. Le lobby de l'assurance marche sur des oeufs.

 

D'autant que les citoyens ne sont pas les seuls à se plaindre du système existant. Assurer les employés coûte une fortune aux entreprises. Chez GM, par exemple, les coûts de santé représentent environ 1500$ par véhicule vendu. Il s'agit d'un cas extrême, mais le constructeur est loin d'être le seul à dénoncer ce fardeau. Et avec la récession, le problème est plus d'actualité que jamais.

Les assureurs ne sont d'ailleurs pas épargnés. Les mises à pied leur font perdre de la clientèle et Barack Obama semble déterminé à réduire les sommes que l'État leur verse pour assurer les retraités couverts par le programme Medicare. Ils n'auront donc pas le choix de participer de façon constructive au débat.

Si tout le monde s'entend sur la nécessité de réformer le système, bien malin qui pourrait prédire quelle forme il prendra au final. Même si les employeurs et les assureurs privés conservent un rôle prépondérant, on voit mal comment il sera possible de couvrir toute la population sans intervention supplémentaire de l'État. Or, sur cette question, ce sont les démocrates qui marchent sur des oeufs. L'industrie de l'assurance s'est toujours farouchement opposée à tout ce qui peut ressembler, à ses yeux, à une concurrence déloyale du gouvernement. En même temps, l'État ne peut pas non plus payer les assureurs pour couvrir tous les Américains qui n'en ont pas les moyens. Les 634 milliards sur 10 ans prévus dans le budget pour réformer le système de santé ne suffiront jamais à la tâche.

Forcer les assureurs à accepter tous les Américains désireux d'acheter une police, sans égard au risque de réclamation qu'ils présentent, pourrait résoudre une grande partie du problème. Sauf que si l'industrie acceptait une telle condition, elle exigerait en retour que chaque citoyen soit forcé de souscrire à une police, afin de recruter des clients plus payants, comme les jeunes, qui ne sont pas portés à s'assurer, car ils consomment peu de soins. Les Américains accepteront-ils un tel carcan?

Le chantier est ambitieux, plus encore que la réforme du système financier. Nous sommes impatients de voir comment Barack Obama entend s'y prendre.

akrol@lapresse.ca

 

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