Ça semble faire une éternité et pourtant, il n’y a même pas deux ans qu’Emmanuel Macron est devenu le plus jeune président français de l’histoire. On l’avait alors vu marcher sur l’esplanade du Louvre, sur l’air de l’Hymne à la joie, dopant les attentes et les espoirs des Français et leur promettant du changement et de l’audace.

Ce qu’on garde en tête, désormais, c’est plutôt le fait que les Français manifestent leur désespoir et leur colère depuis plusieurs mois. Et la longue conférence de presse du président, jeudi, ne semble pas, pour l’instant, avoir changé grand-chose à leur état d’esprit.

PHOTO BORIS HORVAT, AGENCE FRANCE-PRESSE

Les gilets jaunes ont manifesté pour le 23e samedi de suite la semaine dernière. Sur la photo, à Marseille.

Pourtant, il a travaillé d’arrache-pied pour parvenir à désamorcer la crise. Dès décembre dernier, il a promis une série de mesures pour remettre de l’argent dans les poches des Français qui en ont le plus besoin, à commencer par le gel de la taxe sur le carburant qui avait mis le feu aux poudres.

Il s’est ensuite mis à l’écoute de ses concitoyens lors de ce qui a été qualifié de « grand débat ». La conférence de presse de jeudi se voulait la conclusion de cette initiative. Il en a profité pour annoncer un autre train de mesures pour répondre aux doléances exprimées au cours des derniers mois.

Mais un problème fondamental demeure : le président français ressemble à s’y méprendre à un politicien traditionnel qui promet une énième réforme du système.

Or, ce n’est vraisemblablement pas ce que les Français avaient en tête lorsqu’ils ont voté pour lui.

En campagne, Emmanuel Macron a joué un jeu qui n’était pas sans rappeler celui de Donald Trump aux États-Unis, campagne de peur, insultes et provocation en moins. Il s’est présenté comme un candidat antisystème, qui allait non seulement permettre de rompre avec l’alternance gauche-droite, mais ne dirigerait pas le pays de la même façon que ses prédécesseurs. Il incarnait la rupture.

« J’ai touché du doigt les limites de notre système politique », déclarait-il quand, en août 2016, il a quitté le gouvernement de François Hollande. Un système « qui est devenu le principal obstacle à la transformation de notre pays », a-t-il renchéri lorsqu’il a lancé sa campagne en promettant une « révolution démocratique ».

Mais une fois élu, Emmanuel Macron n’a pas cherché à tout casser. Il a plutôt promis de tout réparer. Le contraire eût été absurde – on n’a qu’à regarder ce qui se passe sur le sol américain : on ne souhaite pas cela à la France.

On peut tout de même comprendre le désarroi d’un nombre conséquent de Français, qui s’étaient fait promettre une révolution.

Sans compter qu’en deux ans, le président a plusieurs fois eu l’air déconnecté et arrogant. Lorsqu’il a qualifié les Français de « Gaulois réfractaires au changement » ou qu’il a déploré que l’État «  met trop de pognon  » dans les aides sociales, par exemple.

Cela dit, lors de sa conférence de presse, il a répété qu’il regrettait ces sorties maladroites. « Ça n’a pas aidé à la cause », a-t-il admis. Pour une rare fois, l’humilité était au rendez-vous. En fait, sa participation au grand débat semble lui avoir permis de véritablement comprendre les raisons de ce « profond sentiment d’injustice » éprouvé par tant de Français. Il l’a exprimé de façon éloquente et plusieurs des nouvelles mesures annoncées en font la preuve.

On dit qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire. Malheureusement pour Emmanuel Macron, en politique, ces proverbes sont parfois vrais en théorie, mais pas en pratique.

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