Au terme d'une campagne présidentielle hors norme, Emmanuel Macron a remporté une victoire incontestable contre Marine Le Pen. Décryptage (en quatre mots) de ce triomphe, des espoirs qu'il fait miroiter et des obstacles qui devront être surmontés.

LE SOULAGEMENT

D'abord, le soulagement : Marine Le Pen a perdu. Son mélange de repli, de nationalisme intolérant, de populisme et de catastrophisme a été rejeté par une majorité d'électeurs français. Ce même cocktail avait mis les Britanniques sur la voie d'une sortie de l'Union européenne. Il avait permis, aux États-Unis, l'élection de Donald Trump. Mais ces derniers mois, il aura été battu en brèche en Autriche, aux Pays-Bas et, maintenant, en France. L'heure n'est toutefois pas à l'euphorie. Loin de là. Emmanuel Macron aurait tout avantage à rester humble. Et à trouver des moyens, comme il l'a promis hier, de répondre à «la colère, l'anxiété et les doutes» des électeurs de Marine Le Pen et de ceux qui, désabusés, n'ont pas voté. Pour le nouveau président et ses concitoyens, le plus dur - redresser la barre - reste à venir. Il est néanmoins permis de pousser un (bref) soupir de soulagement.

LE CONSTAT

La France est malade. Le constat ne date pas d'hier. En revanche, il est plus sérieux et plus troublant qu'hier. Le taux de chômage flirte maintenant avec les 10%. Chez les jeunes, il frôle les 25%. La croissance a été limitée à 1,2% l'an dernier. Comme si cela n'allait pas déjà assez mal, le pays a dû faire face ces dernières années à une série d'attentats terroristes fomentés par des musulmans fondamentalistes. La France est malade et il faut lui administrer un remède de cheval. Le modèle français doit à tout prix être réformé. Les experts qui sont à son chevet évoquent généralement deux priorités : l'économie et la sécurité. Emmanuel Macron devra trouver les moyens de doper la croissance, de lutter contre le chômage et de combattre l'insécurité. Et bien sûr tenter d'unifier le pays. Il a dit hier vouloir se battre «de toutes ses forces» contre les divisions. Le défi est de taille.

LES INQUIÉTUDES

Soyons honnêtes, la défaite de Marine Le Pen est pour l'instant plus rassurante que la victoire d'Emmanuel Macron. Ce dernier n'a pas galvanisé les Français comme il l'aurait souhaité. Plusieurs ont voté pour lui par dépit. En campagne, certains lui ont reproché de manquer de substance. Lors des débats, il a livré de solides performances, sans toutefois démontrer hors de tout doute qu'il a l'étoffe d'un président. Il aura cinq ans pour en faire la preuve. Son premier grand test se déroulera dès le mois prochain : les élections législatives. L'autre inquiétude, c'est que Marine Le Pen n'a certainement pas dit son dernier mot. Sa performance surpasse nettement celle de son père en 2002. La dédiabolisation de leur parti, le Front national, a réussi. Ce qui signifie qu'Emmanuel Macron n'a pas le droit à l'erreur. S'il se casse les dents, les idées de Marine Le Pen deviendront encore plus séduisantes.

L'ESPOIR

Et s'il s'agissait véritablement de «la dernière chance de redresser la France de manière pacifique et démocratique»? C'est ce qu'a soutenu l'économiste et éditorialiste français Nicolas Baverez dans son plus récent essai, intitulé Chroniques du déni français. La bonne nouvelle, c'est qu'à force de parler de ce déni, à force de souligner à grands traits les périls du statu quo, une majorité de Français semble avoir compris que l'immobilisme est intenable. Le scrutin présidentiel d'hier permet de comprendre que les Français ne veulent plus faire l'autruche. Comment expliquer, sinon, la déroute des deux grands partis traditionnels? Et la victoire incontestable du plus jeune président de l'histoire du pays et de son mouvement si récent? Le changement vient d'être réclamé haut et fort. Il y a là, assurément, des raisons d'espérer.

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