De qui s'agit-il ?

Premier indice : ce voisin américain est reconnu pour ses méthodes aussi audacieuses que brutales. Il fait généralement passer un mauvais quart d'heure à ses rivaux.

Deuxième indice : plusieurs craignent son impact sur l'économie canadienne.

Troisième indice : non, il ne s'agit pas de Donald Trump.

C'est du géant du commerce et de la distribution, Amazon, qu'il est question.

L'entreprise, dirigée par le milliardaire Jeff Bezos, a fait la manchette au cours des derniers jours. Elle a annoncé que ses clients montréalais pouvaient se faire livrer leur commande en moins de 24 heures.

Ils « auront désormais accès à plus de 1 million d'articles plus rapidement, qu'il s'agisse d'achats de livres, de vêtements, de films ou de consoles de jeu », a expliqué Amazon dans un communiqué signé à Seattle, où se trouve son siège social.

C'est sans contredit un exploit.

Il n'y a pas de gêne à applaudir les prouesses de cette multinationale. En revanche, n'oublions pas d'en mesurer les impacts sur notre économie.

Y compris sur nos artères commerciales, dont le dépérissement nous inquiète tant.

On sait que l'engouement pour le commerce en ligne est l'une des raisons pour lesquelles plusieurs commerçants montréalais tirent le diable par la queue et d'autres ferment boutique.

On sait aussi que ce qui fait particulièrement mal aux commerces d'ici, c'est que beaucoup de Québécois achètent sur des sites étrangers, dont Amazon.com (ils peuvent éviter d'y payer les taxes) et sa filiale canadienne Amazon.ca.

« Seulement 26 % des sommes dépensées le sont chez des entreprises situées au Québec », selon un récent rapport à ce sujet, auquel a collaboré le professeur Jacques Nantel, de HEC Montréal.

Plusieurs facteurs sont responsables de cette tendance malsaine - incluant la sous-représentation des détaillants québécois sur le web.

Mais il y a aussi le fait que les détaillants québécois ne se battent pas à armes égales contre des multinationales qui peuvent, par conséquent, offrir des prix défiant souvent toute concurrence.

Le Conseil québécois du commerce de détail (CQCD) ne cache pas son irritation face à cet effet pervers. L'an dernier, il a dénoncé la situation, ciblant tout particulièrement le commerce transfrontalier.

Il a donné la parole à une série de commerçants et d'experts d'ici, incluant le président de Simons. Ce dernier en veut aux stratégies dites d'optimisation fiscale agressive, utilisées par les grandes multinationales comme Apple, Starbucks et Amazon.

Des stratégies actuellement légales, qui permettent à des multinationales d'éviter de payer autant d'impôts que les entreprises locales.

Dans une vidéo courte, mais éloquente - qui a hélas été visionnée jusqu'ici à peine plus d'une centaine de fois -, Peter Simons explique son malaise lorsqu'il voit comment des entreprises comme Amazon utilisent nos infrastructures « sans en assumer les responsabilités ».

Le CQCD parle d'un « effet gruyère » en raison des « trous » dans l'économie québécoise provoqués par cet « exode des capitaux ».

Fort heureusement, plusieurs rapports et études ont montré qu'il existe des solutions.

Les commerçants d'ici doivent réagir et innover. Entre autres en trouvant des façons de se démarquer dans leurs boutiques et d'être plus attractifs sur le web. Nos élus, eux, doivent non seulement mieux aider ces commerçants à relever ces défis, mais aussi empêcher les multinationales de contourner les règles du jeu.

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