Dire qu'on pensait que les jeux étaient faits. Que Donald Trump était un canard boiteux et que sa rivale Hillary Clinton allait franchir la ligne d'arrivée de la course à la Maison-Blanche avec une avance insurmontable.

Donald Trump tirait de l'arrière la semaine dernière pour ce qui est des sondages effectués dans de nombreux États-clés. Parallèlement, les sommes amassées par sa campagne pour le sprint final ne faisaient pas le poids par rapport à la cagnotte de sa rivale.

L'intervention troublante du grand patron du FBI vient de brouiller les cartes.

James Comey a fait savoir vendredi qu'il avait donné son accord pour relancer l'enquête sur Hillary Clinton et les serveurs privés qu'elle utilisait lorsqu'elle était secrétaire d'État. La découverte de milliers de courriels « qui semblent pertinents » dans ce dossier serait à la source de ce revirement.

Selon des sources citées par divers médias américains, les courriels en question auraient été découverts chez l'une des proches collaboratrices d'Hillary Clinton, Huma Abedin. Son ex-mari, le politicien déchu Anthony Weiner, fait actuellement l'objet d'une enquête pour avoir expédié des sextos à une adolescente de 15 ans. Les courriels se trouvaient, semble-t-il, sur l'ordinateur qu'il partageait jadis avec la conseillère d'Hillary Clinton.

« C'est comme si on venait de se faire frapper par un camion à 18 roues », a réagi la présidente du Comité national démocrate, Donna Brazile.

Des sondages publiés hier semblent confirmer ses craintes. Selon l'un d'eux, effectué pour ABC News et le Washington Post, l'écart se resserre entre les deux principaux candidats à la Maison-Blanche. Et près du tiers des électeurs (34 %) se disent moins susceptibles de voter pour Hillary Clinton en raison de ces récents rebondissements.

La décision de James Comey a été explicitée de façon nettement trop vague dans une lettre de trois courts paragraphes expédiée à près d'une vingtaine de membres du Congrès américain et dans une autre, encore plus brève, destinée à ses employés.

« Bien que le FBI ne puisse déterminer si ces informations seront ou non significatives, et que je ne puisse prédire combien de temps il nous faudra pour venir à bout de ce travail supplémentaire, j'estime qu'il est important de tenir vos commissions au courant de notre travail, eu égard à mes déclarations passées », a notamment écrit le directeur du FBI.

Le caractère sibyllin de ses propos a fait le bonheur des républicains et mis en colère les démocrates. C'est qu'ils laissent place à toutes sortes d'interprétations. « M. Comey doit vraiment venir expliquer pourquoi il a pris cette mesure sans précédent », a répliqué hier le directeur de la campagne d'Hillary Clinton, John Podesta.

Une telle initiative permettrait effectivement de dissiper les doutes et de faire taire ceux qui insinuent à tort, comme Donald Trump, que le FBI tente de « corriger » son « erreur » d'il y a quelques mois. James Comey avait alors recommandé de ne pas poursuivre Hillary Clinton pour la négligence dont elle avait fait preuve avec ses courriels professionnels.

Le directeur du FBI risque toutefois de se murer dans le silence d'ici le scrutin du 8 novembre. Il faut donc espérer que les électeurs américains n'oublieront pas que Donald Trump nous a donné la preuve, au cours de la campagne qui s'achève, que ses nombreux errements sont nettement plus préoccupants que le manque de jugement manifesté par Hillary Clinton dans la gestion de ses courriels.

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