Faut-il boycotter Apple ?

C'est ce qu'estime le candidat républicain Donald Trump, qui a récemment critiqué l'entreprise américaine avec autant d'aplomb qu'il dénonce ses rivaux. Il a carrément promis de bouder son iPhone et de n'utiliser que son téléphone Samsung - il possède, semble-t-il, deux appareils.

La raison de sa colère ? Le bras de fer qui oppose actuellement Apple au FBI.

Les forces de l'ordre ont tenté, en vain, de pénétrer dans l'iPhone de Syed Farook, l'un des deux auteurs de l'attentat terroriste du 2 décembre dernier en Californie.  Elles ont baissé les bras sachant qu'après dix tentatives infructueuses, les données de l'appareil pourraient être supprimées. D'où l'appel lancé à Apple, par l'entremise d'un tribunal californien.

Le FBI demande ni plus ni moins à l'entreprise de créer un logiciel qui lui permettrait de faire fi des mesures de sécurité du téléphone.

En somme, la police fédérale réclame la création d'une « porte dérobée » qui lui permettrait - appelons un chat, un chat -  de pirater l'appareil.

Il est important de préciser que le FBI a déjà obtenu tout ce que contenait le téléphone et qui avait déjà été sauvegardé sur iCloud. Le problème, c'est que la dernière sauvegarde date du 19 octobre. L'attentat ayant été perpétré en décembre, les données accumulées pendant près de deux mois demeurent inaccessibles, même pour Apple.

« Ce téléphone contient peut-être des indices qui nous permettront de retrouver d'autres terroristes. Ou peut-être pas. Mais nous ne pourrons pas regarder les survivants dans les yeux ni nous regarder dans un miroir si nous ne suivons pas cette piste », a déclaré le directeur du FBI, James Comey.

Ce dernier sait manifestement faire vibrer la corde sensible de l'Américain moyen. Ce qu'il ne dit toutefois pas, c'est à quel point ce qu'il réclame est un précédent qui risque fort de se révéler dangereux.

Apple estime, avec raison, que si elle offre au FBI une clé pour pénétrer dans ce téléphone, elle met en péril les données de centaines de millions d'utilisateurs de ses produits.

Car il est dur de croire les autorités lorsqu'elles promettent que cette clé ne serait utilisée qu'une seule et unique fois. Les révélations d'Edward Snowden sur l'espionnage à grande échelle pratiqué par le gouvernement américain ont prouvé que la vie privée des citoyens est parfois le dernier de ses soucis.

De nouvelles informations dévoilées hier semblent d'ailleurs contredire les autorités américaines. Depuis septembre dernier, elles ont demandé à Apple l'accès aux données contenues dans une dizaine d'autres téléphones. Il est donc faux de prétendre qu'elles réclament l'accès à un seul appareil.

Le jeu n'en vaut pas la chandelle, non plus, en raison des conséquences fâcheuses prévisibles si ce nouveau logiciel se retrouve entre les mains de pirates informatiques. Ou de despotes. Il faut s'y attendre, des tyrans demanderont à Apple de pouvoir eux aussi épier les téléphones de leurs citoyens.

Ne soyons pas naïfs, Apple ne fait pas que protéger les libertés individuelles. Il s'agit aussi d'une décision d'affaires. Mais son combat contre le FBI doit néanmoins être salué et nous rappeler que la surveillance de masse pratiquée par le gouvernement a des limites et doit être encadrée.

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