Un cimetière n’est pas un endroit ordinaire. C’est un lieu de mémoire et de recueillement qui appartient à la collectivité. C’est un site patrimonial qu’on aime visiter même si aucun de nos proches n’y est enterré. C’est un parc où il fait bon se promener, surtout quand il est en plein cœur du mont Royal.

Une grève dans un tel lieu ne doit pas être traitée comme n’importe quel conflit de travail. Les élus doivent s’en mêler.

La situation actuelle au cimetière Notre-Dame-des-Neiges est désastreuse. Les employés de bureau et les employés d’entretien, sans contrat de travail depuis 2017 et 2018, sont en grève depuis septembre et janvier dernier. En gros, ils souhaitent des augmentations de salaire et un plancher d’emploi. L’employeur, une OBNL aux prises avec des difficultés financières, veut réduire la masse salariale.

Les négociations traînent en longueur. Résultat : le cimetière est fermé et les familles ne peuvent ni enterrer leurs morts ni visiter leurs défunts.

Comme si ce n’était pas suffisant, la récente tempête de verglas a fait très mal au parc. On peut parler de catastrophe : 75 % des arbres ont été touchés. Un ingénieur forestier consulté par les gestionnaires du cimetière a expliqué qu’en raison du temps chaud qui a précédé la tempête, les branches étaient gorgées de sève, les rendant encore plus vulnérables aux intempéries. Un mois plus tôt, le verglas aurait fait beaucoup moins de dommage.

Depuis, conflit de travail oblige, il n’y a que quatre cadres qui travaillent au nettoyage. À ce rythme-là, on ne doit pas s’attendre à ce que le cimetière rouvre bientôt.

La Fabrique de la paroisse Notre-Dame de Montréal, qui gère le cimetière, souhaiterait ouvrir les grilles exceptionnellement dimanche prochain, jour de la fête des Mères. Elle devrait annoncer sa décision d’ici peu, mais seuls les secteurs sécuritaires seraient accessibles.

Pendant ce temps, les cercueils s’entassent dans le reposoir. Plus de 200 cercueils s’y trouvent, en attente d’une inhumation.

Et tout cela se passe dans l’indifférence la plus totale.

Pas un son en provenance de Québec ou de l’hôtel de ville de Montréal. Pas un signe qui nous dirait qu’on prend ce conflit au sérieux, qu’on se soucie des familles qui ne peuvent pas enterrer leurs morts.

Lors du précédent conflit de travail, en 2008, l’Association pour la défense des droits des défunts et des familles du Cimetière Notre-Dame-des-Neiges s’était tournée vers le gouvernement du Québec, qui était intervenu.

Il est plus que temps que Québec s’intéresse à cette négociation.

La population endeuillée n’a pas à payer pour ce conflit, encore moins après trois ans de pandémie lors desquelles tout ce qui touche les rites funéraires a été difficile et douloureux.

C’est d’autant plus pressant qu’en vertu de la Loi sur les activités funéraires, le cimetière a jusqu’au 15 mai pour procéder à l’inhumation ou à la crémation des cadavres, sans quoi il s’expose à des amendes de plusieurs milliers de dollars.

Disons-le, la gestion de ce cimetière est problématique depuis plusieurs années. Quelques scénarios circulent pour sortir ce joyau montréalais du marasme. Ils méritent l’attention des décideurs. Certains suggèrent la création d’une fiducie qui permettrait de solliciter des dons du public pour l’entretien du cimetière. L’Association des familles propose pour sa part la cession du cimetière à la Ville, qui veillerait à son entretien, ce qui permettrait à la Fabrique de se concentrer sur la gestion de la basilique Notre-Dame de Montréal. Chose certaine, le statu quo n’est plus possible.

Les morts, comme les vivants qui les visitent, méritent mieux.

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