Vous avez été rassuré par le résultat des élections de mi-mandat ? Désolé de vous décevoir, mais les Américains dansent toujours sur un volcan.

Donald Trump est affaibli, bravo ! Mais sa capacité de nuisance reste — pour l’instant — intacte.

Les républicains n’ont pas fait subir une raclée aux démocrates, mais tout porte à croire qu’ils vont malgré tout prendre le contrôle de la Chambre des représentants en janvier. Des politiciens radicalisés pourraient s’emparer de postes clés et nous offrir un bien triste spectacle.

Le « grand mensonge » est toujours vivant. Des candidats républicains ayant mis en doute ou nié les résultats de l’élection de 2020 ont été battus, mais d’autres ont néanmoins été élus.

Enfin, les démocrates n’ont pas sauvé la face grâce à Joe Biden lors des élections de mi-mandat. Ils ont sauvé la face en dépit de Joe Biden. Les deux tiers des Américains (67 %) sondés mardi lorsqu’ils ont voté ont dit espérer que le président démocrate ne se représentera pas en 2024.

Deux sur trois !

Vous nous voyez venir avec nos gros sabots…

Oui, il faut espérer que Joe Biden annoncera sa retraite de la vie politique avant la prochaine élection présidentielle pour que les démocrates puissent lui trouver un successeur à la fois plus dynamique et plus inspirant.

Soyons honnêtes, ce qui était vrai en 2020 ne l’est plus.

Joe Biden avait tenu tête à Donald Trump avec un aplomb remarquable. Qui d’autre que lui, ancien vice-président respecté et pugnace, aurait pu remettre ce démagogue à sa place avec fermeté tout en résistant à ses attaques cinglantes lors des débats ?

Qui d’autre que lui, après avoir passé huit ans à la Maison-Blanche avec Barack Obama, pouvait se réclamer de l’espoir incarné par l’ancien président démocrate ?

Et qui d’autre que lui, avec sa longue expérience en matière de politique étrangère, pouvait promettre de rétablir la réputation des États-Unis dans le monde sans sonner faux ?

Mais les Américains ont désormais vu Joe Biden à l’œuvre en tant que président, et le moins qu’on puisse dire est qu’ils ne sont pas très enthousiastes.

Le bilan de Biden n’est pas mauvais, pourtant. On lui doit un retour à la normale après l’ère Trump, y compris à l’international. On soulignera aussi, notamment, son leadership dans le dossier ukrainien, son plan sur le climat et sa gestion de la pandémie.

Toutefois, l’inflation est telle que bon nombre d’Américains ont l’impression qu’il est responsable du fait qu’ils tirent le diable par la queue.

Et, surtout, son état de santé est devenu une véritable distraction. Pas besoin de verser dans l’âgisme pour conclure que tous ces moments où le plus vieux président de l’histoire du pays (il aura 80 ans le 20 novembre) semble désorienté ou confus font très mal à son image.

Vous pouvez compter sur les républicains pour profiter de cette vulnérabilité. Ils seront sans pitié.

Que tout ça soit juste ou pas n’est pas très important.

Ce qu’on retient, c’est qu’il est loin d’être sûr que ce bon vieux Joe pourra répéter en 2024 son exploit de 2020, c’est-à-dire empêcher un populiste autoritaire de s’installer une nouvelle fois à la Maison-Blanche. Que ce soit Donald Trump ou son émule (et possible rival), le populaire gouverneur floridien Ron DeSantis, qui semble avoir appris le manuel trumpiste par cœur.

Les États-Unis ne peuvent pas se permettre de rejouer dans ce film. Les autres démocraties libérales non plus d’ailleurs. Souvenons-nous du traumatisme infligé au Canada.

Ajoutons que si Joe Biden se retire après un seul mandat, il partira la tête haute. On se souviendra de lui comme le démocrate qui a vaincu Donald Trump et qui était président lorsque son parti a résisté au trumpisme davantage qu’on l’aurait cru lors des élections de mi-mandat.

La question qui tue : qui pourrait remplacer Joe Biden ?

Réponse : les successeurs potentiels se font discrets tant et aussi longtemps que le principal intéressé n’a pas décidé qu’il ne sollicitera pas de deuxième mandat, mais ils sont nombreux.

Certains des candidats à la course au leadership du Parti démocrate en 2020 vont sûrement se lancer de nouveau. Mais ils auront fort à faire pour faire oublier qu’ils ont été vaincus par Joe Biden.

On verra à coup sûr apparaître de nouveaux visages plus électrisants.

On pense en particulier à deux gouverneurs qui ont le vent dans les voiles :

  • celui de la Californie, Gavin Newsom, qui est l’un des ténors démocrates les plus combatifs ces jours-ci ;
  • celle du Michigan, Gretchen Whitmer, qui a été facilement réélue mardi dans un État clé du Midwest.

Et il y aura d’autres candidats…

Les démocrates ont besoin de sang neuf.

Il en va de l’avenir de leur parti en 2024.

Et si on s’en préoccupe tant, ici comme ailleurs, c’est que cet avenir est encore inextricablement lié à celui de la démocratie américaine.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion