N’en déplaise au candidat caquiste Bernard Drainville, personne ne va « lâcher » les politiciens avec les gaz à effet de serre (GES) pendant la présente campagne.

Nous continuerons au contraire de les talonner, pour la simple et bonne raison qu’il s’agit de l’enjeu le plus crucial de notre époque. Et que les scientifiques nous disent que la fenêtre pour agir, c’est maintenant.

En 2022, lorsqu’on présente un projet de transport de plusieurs milliards de dollars comme le troisième lien, il faut en documenter les effets avec autre chose que des boutades.

Esquiver les enjeux par la désinvolture est une stratégie qui atteint rapidement ses limites. Surtout qu’en ce début de campagne, cette tactique se bute aux propositions concrètes de deux partis qui ont déjà dévoilé leur plan vert : le Parti québécois et Québec solidaire.

L’une des idées qui font le plus réagir ces jours-ci est celle des « bonus-malus » sur les véhicules, proposée par Québec solidaire. Le principe : taxer les véhicules les plus polluants (au-delà de 210 grammes de CO2 par kilomètre) et subventionner les plus verts.

La taxe de 15 % représenterait une facture supplémentaire d’environ 6000 $ pour un F-150 ou de 10 000 $ pour un GMC Yukon.

Bien sûr que ça fait « casseux de party », surtout en plein festival des promesses de baisses de taxes et d’impôts.

Voilà pourtant une mesure incontournable, que nos politiciens n’ont jamais eu le courage d’adopter par crainte de se mettre à dos la fameuse « classe moyenne ».

Pourquoi incontournable ? Parce que l’explosion du nombre de VUS, camionnettes et autres véhicules polluants sur nos routes est LA principale cause d’augmentation des GES au Québec.

Ça en est carrément frustrant. Plusieurs secteurs ont effectué des efforts considérables pour réduire leurs émissions par rapport à 1990. On pense à l’industrie (- 24 %), à la gestion des déchets (- 42 %) ou au bâtiment (- 27 %).

Mais ces gains ont été complètement annulés par le secteur des transports, dont les émissions ont explosé de 33 % pendant cette période.

Ne pas s’attaquer à cela, c’est baisser les bras et renoncer à toute chance d’atteindre notre cible de réduction pour 2030.

Donner des carottes sans sortir le bâton ? On l’a essayé. Ça ne fonctionne pas. Québec subventionne généreusement les véhicules électriques (jusqu’à 7000 $). Mais chaque fois qu’on en vend un, on vend du même coup 11 camions légers à essence. On recule au lieu d’avancer.

L’inflation est évidemment le nouveau prétexte pour ne pas agir, et la cheffe libérale Dominique Anglade a sauté dessus.

« Aujourd’hui, les gens sont pris à la gorge et doivent faire des choix déchirants entre l’épicerie et payer le loyer », a-t-elle dit à Radio-Canada pour justifier sa décision de ne pas taxer les véhicules polluants.

C’est oublier que ces véhicules sont aussi les plus chers, tant à l’achat qu’au moment de faire le plein. Et que ceux qui veulent éviter la taxe ont des options moins dispendieuses sous la main.

Précisons que QS a déjà prévu exempter de sa taxe les familles nombreuses et ceux qui utilisent les véhicules plus costauds pour le travail. Même chose pour les gens des régions qui peuvent avoir réellement besoin de ces véhicules et qui ont moins accès aux transports en commun.

La taxe n’est sans doute pas parfaite. On peut par exemple se demander si une taxe graduelle, qui croît avec le niveau de pollution du véhicule, aurait été préférable au taux fixe proposé.

Mais l’important est que QS vient ici briser un tabou.

En ce début de campagne, il faut d’ailleurs se demander qui sont vraiment ceux qu’on surnomme les pelleteux de nuages par rapport au climat. S’agit-il des politiciens qui proposent des solutions concrètes ? Ou de ceux qui nous assurent qu’on atteindra nos cibles sans changements ni contraintes, par un procédé magique qui n’a pas fonctionné par le passé, mais finira par opérer miraculeusement à l’avenir ?

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