Le gouvernement Legault cherche-t-il à reprendre le contrôle de la planification des transports collectifs dans la région de Montréal ?

La question se pose.

Mercredi, le ministre des Transports, François Bonnardel, a déposé un rapport très dur concernant l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM).

Comme le prévoit la loi, ce rapport visait à faire le point sur l’organisme de planification et de coordination des transports collectifs, cinq ans après sa création. Rappelons que le gouvernement Couillard avait créé l’ARTM pour dépolitiser la planification des transports collectifs dans la grande région montréalaise.

Or, le constat sur la performance de l’ARTM est loin d’être positif : gestion brusque, manque de transparence, ingérence dans les opérations des sociétés des transport, opacité du processus budgétaire, mauvaise collaboration avec les partenaires… les critiques sont acerbes.

Les auteurs du rapport saluent cependant le ménage que l’ARTM a effectué dans les quelque 700 titres de transport qui existaient dans la grande région de Montréal. Sur ce point, elle peut dire « mission accomplie », même si certains usagers de la Rive-Sud digèrent mal les 5,25 $ qu’il leur faudra débourser pour prendre le métro à la station Longueuil–Université-de-Sherbrooke.

Ce rapport arrive à un mauvais moment pour l’ARTM. L’organisme doit superviser la planification du grand projet de transport collectif pour l’est de Montréal à la suite du retrait de la Caisse de dépôt et placement du Québec et de son projet de REM de l’Est.

Cette piètre évaluation de la performance de l’ARTM sera-t-elle l’excuse invoquée par le ministre des Transports pour prendre les rênes de ce grand projet ? Le ministre Bonnardel a déclaré qu’il laissait quelques semaines à l’ARTM pour s’ajuster sinon, il n’hésiterait pas à faire « rouler des têtes…. »

Vrai, l’ARTM doit rectifier le tir et prendre acte du rapport, ce qu’elle a d’ailleurs fait mercredi. Elle doit également assumer son leadership. Ce n’est pas pour rien que certains l’appellent l’« autorité sans autorité ». L’organisme peine à s’imposer.

Cela dit, on ne lui a jamais facilité la tâche. Peu de temps après sa création, le gouvernement Couillard a accordé des pouvoirs extraordinaires à la Caisse de dépôt qui a développé son REM de l’Ouest sans égard pour l’ARTM qui n’a eu d’autre choix que de regarder le train passer.

Puis le gouvernement Legault a continué à piétiner l’autorité de l’ARTM en confiant à CDPQ Infra les projets de REM de l’Est et de celui de la Rive-Sud. Sans la reconnaissance du gouvernement, il était bien difficile pour l’organisme d’assumer un quelconque leadership.

Comme si ce n’était pas suffisant, la pandémie a frappé, avec ses impacts catastrophiques sur l’achalandage et le financement des transports collectifs.

Ces deux obstacles majeurs au fonctionnement de l’ARTM, les auteurs du rapport les reconnaissent, heureusement.

Est-ce à dire que sans le REM et la COVID-19, l’ARTM aurait mérité une note parfaite ?

Absolument pas.

On se souviendra seulement de son plan stratégique de développement, une longue liste totalisant 57 milliards de dollars de projets sans aucune priorité. Le ministère avait renvoyé l’ARTM à sa table à dessin, avec raison.

Ce jour-là, l’ARTM a échoué à démontrer qu’elle avait ses dossiers bien en main et une vision pour les articuler.

Dans la foulée du rapport du ministère des Transports, l’ARTM doit donc revoir son mode de fonctionnement, améliorer sa collaboration avec les sociétés de transport, et se doter de l’expertise nécessaire pour mieux planifier ses projets.

La balle est dans son camp et elle doit agir rapidement.

Mais ce rapport ne doit pas servir d’excuse pour que le gouvernement s’immisce davantage dans les décisions concernant le transport collectif dans la région montréalaise.

Il est important de développer des projets basés sur les besoins des usagers et la réduction du tout-à-l’auto, pas sur des motivations électoralistes.

La responsabilité de planifier le futur projet de transport structurant pour l’est de Montréal doit donc revenir à l’ARTM, en collaboration avec la Ville, la STM et le ministère des Transports.

Ce sont des wagons qu’on veut voir rouler, pas des têtes…

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