Une petite question d’intérêt général pour amorcer cet éditorial sur les Jeux de Pékin : quelle est la « vision » du Comité international olympique (CIO) ?

Si vous ne le savez pas, vous aurez du mal à le deviner. Car la réponse, c’est « bâtir un monde meilleur par le sport ».

Ne riez pas.

C’est même écrit tout en haut du site web de ce « gardien des Jeux olympiques ».

Noble vision… mais les responsables du CIO devraient s’acheter des lunettes.

Ils ne voient plus clair.

Alors que s’achèvent les Jeux de Pékin, qui peut sérieusement prétendre que l’évènement aura servi, un tant soit peu, à bâtir un monde meilleur ?

Le ver était dans la pomme, direz-vous.

En effet.

Le péché originel fut le feu vert donné par le CIO à la Chine pour l’organisation des Jeux.

Certains ont suggéré au cours des dernières années de les tenir ailleurs, mais il était trop tard.

Et l’impact du boycottage diplomatique du Canada et de certains de ses alliés, on le savait, serait très limité.

C’est ainsi que le monde entier s’est retrouvé à cautionner le mépris de la Chine envers les droits de la personne.

Un monde meilleur ?

Parlez-en aux habitants de Hong Kong, dont les libertés ont été restreintes par Pékin au cours des deux dernières années. Ou parlez-en à la minorité ouïghoure en Chine, dont le sort est encore moins enviable.

Le régime chinois aurait pu chercher, comme lorsqu’on lui a accordé les Jeux en 2008, à mettre de l’eau dans son vin.

Un monde meilleur ?

C’est plutôt le contraire qui s’est passé. Dès l’ouverture des Jeux de 2022, en accueillant le président russe Vladimir Poutine tel un invité d’honneur, la Chine a décidé de narguer le monde occidental.

Parlez-en aux Ukrainiens qui vivent dans la peur, alors que Vladimir Poutine, reçu en héros à Pékin, a massé plus de 150 000 militaires autour de leur pays.

Toujours au sujet de la Russie, les Jeux de Pékin nous ont aussi permis de mesurer la nonchalance du CIO quant à la lutte antidopage.

Le cas de la patineuse d’à peine 15 ans Kamila Valieva, qui a craqué sous la pression jeudi alors qu’elle est au cœur d’une affaire de dopage, est tragique. Mais il remet aussi en question les décisions prises antérieurement par le CIO au sujet des athlètes russes, en lien avec le programme de dopage de Moscou.

Un monde meilleur ?

N’en parlez pas à l’ancienne championne de tennis Peng Shuai… car elle ne vous dira rien.

Il faut pourtant en parler, car dans ce dossier aussi, le CIO s’est discrédité encore davantage.

Son président, Thomas Bach, a rencontré l’athlète, qui avait accusé l’an dernier un haut dirigeant chinois de l’avoir violée. Le message du CIO était clair : circulez, il n’y a plus rien à voir. Une entrevue a même été offerte au quotidien français L’Équipe, permettant à l’athlète de nier toute cette affaire.

Le régime chinois a pu sauver la face. Le CIO a perdu la sienne.

Un monde meilleur ?

Oui, pour le président chinois.

La démonstration de puissance du régime chinois – qui a su à la fois dompter les Occidentaux et le virus de la COVID-19 lors des Jeux – permettra assurément à Xi Jinping de renforcer sa poigne (de fer) sur le pays.

Le CIO compte toujours sur les performances des athlètes pour étouffer les controverses et le cynisme à l’égard des Jeux.

Nos athlètes nous ont fait vivre des émotions fortes, comme d’habitude. Ils nous ont permis d’assister à des moments de grâce. La magie était au rendez-vous.

On les en remercie.

Mais cette fois, pour des raisons qui dépassent les performances des athlètes, les masques sont tombés, le vernis a craqué et la fête a été gâchée.

Il n’est peut-être pas loin, le point de bascule.

Celui où on aura tant souillé l’image des Jeux que le public leur tournera le dos, petit à petit. Et les athlètes seraient les premiers perdants.

Tous ceux qui sont impliqués de près ou de loin dans l’organisation de cette grand-messe auraient tout avantage à s’en rendre compte rapidement.

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