La caque sent toujours le hareng. 

Vous connaissez ce proverbe ?

La caque, c’est un tonneau de bois dans lequel on entrepose le hareng, salé ou fumé. Impossible d’enlever cette odeur même si le poisson n’est plus là. Comme quoi « on porte toujours les traces de son origine ».

À voir les controverses qui éclaboussent le parti de François Legault sur des enjeux environnementaux depuis quelques semaines, on peut légitimement se demander : est-ce que la CAQ sent toujours le pétrole ?

Réponse courte : non.

Explications : l’environnement n’était pas dans l’ADN du parti, dont le développement économique était le cheval de bataille. En 2012, François Legault misait même sur l’or noir pour réduire la dette du Québec. Son parti rêvait d’exploiter le pétrole du golfe du Saint-Laurent (y compris sur l’île d’Anticosti).

Or, la CAQ a amorcé, peu après son arrivée au pouvoir, un virage vert.

Voilà pour la réponse courte.

Mais vous vous en doutez bien, cet éditorial ne se terminera pas ici. Vous aurez droit à une réponse longue, nettement plus nuancée.

Allons-y…

CAQ et environnement : la greffe semble en train de prendre, mais l’opération se révèle très compliquée.

Le virage du parti peut être un jour vert foncé, puis le mois suivant vert très pâle, en ayant passé entre les deux par d’innombrables nuances.

Si bien qu’on cherche encore la vraie couleur du parti sur les questions environnementales.

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Vous avez eu la chance de le remarquer récemment : François Legault ne s’est pas transformé en Hubert Reeves.

La construction éventuelle d’un tunnel pharaonique entre Québec et Lévis – et son impact potentiel sur l’environnement – en a sidéré plus d’un.

On s’inquiète notamment de son effet sur l’étalement urbain… et en la matière, une autre décision du gouvernement caquiste avait fait la manchette l’an dernier. On a autorisé le dézonage de 17 millions de pieds carrés de terres agricoles dans la MRC de Montcalm (dans Lanaudière).

L’attitude du gouvernement est encore plus gênante pour ce qui est de la protection des espèces menacées et vulnérables. Québec devrait se doter d’outils efficaces pour y parvenir. Mais la volonté politique n’est pas là.

Alors en attendant, c’est Ottawa qui a dû venir à la rescousse d’espèces comme la rainette faux-grillon et le chevalier cuivré. Gênant…

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Nuançons encore un peu.

Parlons des aires protégées.

Au cours du dernier mois, ce dossier a aussi mis le gouvernement caquiste dans l’embarras. Il n’a pas encore atteint la cible qu’il s’était fixée (17 %), contrairement à ce qu’il avait soutenu.

Mais, surtout, on a appris que le ministère des Forêts s’entêtait à bloquer la création d’aires protégées dans le sud du Québec, là où la biodiversité est la plus riche.

Cela dit, si ces critiques fondées, il reste qu’on devrait atteindre sous peu l’objectif souhaité pour l’ensemble du Québec. Ce n’est pas rien.

Dans d’autres dossiers importants, on a mis de l’avant des initiatives prometteuses. Comme dans celui de la consigne, que les gouvernements précédents avaient échoué à faire avancer. Ou dans ceux des déversements illégaux de sols contaminés et de la gestion des déchets, dont le recyclage.

Quant au plan caquiste de lutte contre les changements climatiques, pièce maîtresse de l’action environnementale, il est sûrement mieux que ce à quoi nous aurions pu nous attendre.

En revanche, il n’est pas à la hauteur du remède dont notre planète a besoin. Il manque d’ambition.

Le Québec s’est engagé à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 37,5 % d’ici 2030 (par rapport à leur niveau de 1990). Mais on tarde à se donner les moyens d’atteindre cet objectif. Et le verbe tarder est ici un euphémisme.

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Bref, il y a bel et bien un virage vert à la CAQ, mais il n’est pas assez prononcé.

Pas assez rapide, non plus.

On s’est ouvert les yeux, mais les paupières demeurent un peu trop lourdes.

L’automne prochain, le sort de la planète va probablement se hisser au sommet de nos préoccupations, notamment en raison de la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques en Écosse.

Le gouvernement Legault aurait tout avantage à en profiter pour passer à la vitesse supérieure.

La planète ne pourra pas éternellement se contenter de plans d’action nuancés.

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