À moins d’une semaine d’intervalle, Québec a fermé la porte à deux solutions réclamées par de nombreux commentateurs et experts pour lutter contre la pandémie de COVID-19.

Il y a deux semaines, c’était l’idée d’installer des purificateurs d’air dans les écoles qui était rejetée par les autorités.

La semaine dernière, c’est le déploiement à grande échelle de tests rapides qui a été écarté.

Dans ces deux cas, l’Ontario a pris les décisions inverses. La province voisine a débloqué des fonds dès l’automne pour installer des purificateurs d’air dans les écoles. Et elle vient d’annoncer qu’elle déploiera jusqu’à 300 000 tests rapides par semaine sur les lieux de travail, dans les écoles et dans les foyers pour personnes âgées.

Qui a raison et qui a tort ? Bien malin qui peut le dire. Le fait que des approches aussi opposées aient été prises par les deux provinces montre bien que les enjeux sont complexes et que les solutions le sont aussi. Ces questions, malheureusement, ne se tranchent pas en 280 caractères sur Twitter.

Mais ces deux cas mettent en lumière une différence d’approche entre le Québec et l’Ontario.

L’Ontario a décidé de déployer des armes imparfaites contre le virus. Le Québec, lui, a opté pour étudier minutieusement chacune d’entre elles avant de décider de ne pas les utiliser (ou, dans le cas des tests rapides, d’en circonscrire grandement l’usage).

Les décisions du gouvernement Legault ont été prises sur la base d’avis d’experts. On ne le lui reprochera évidemment pas. Ces rapports, publics, permettent de comprendre les raisonnements qui sous-tendent les décisions. Cela donne une base pour discuter rationnellement des choix effectués. C’est à saluer.

Le hic, c’est que dans chaque cas, ces avis ont mis un temps fou à arriver. Dès l’été dernier, des questions étaient posées sur la qualité de l’air dans les écoles. Le rapport là-dessus a été déposé… en janvier.

Il a aussi fallu plusieurs mois pour que le Québec se prononce sur les tests rapides. Procéder avec « prudence » – le mot revient six fois dans le rapport sur les tests rapides –, c’est bien dans des circonstances normales. Sauf que nous ne sommes pas dans des circonstances normales. Nous sommes en situation d’urgence.

« Avec cette logique, nous n’aurions pas de vaccin actuellement », souligne le DDavid Juncker, professeur au centre de génomique de l’Université McGill. Le DJuncker incite à « prendre des décisions avec des informations partielles et bouger » en temps de crise.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

« L’Ontario a décidé de déployer des armes imparfaites contre le virus. Le Québec, lui, a opté pour étudier minutieusement chacune d’entre elles avant de décider de ne pas les utiliser (ou, dans le cas des tests rapides, d’en circonscrire grandement l’usage) », souligne notre chroniqueur.

Nous avons tous en tête l’exemple du masque, où le Québec, comme d’autres territoires, a d’abord insisté sur les aspects négatifs du couvre-visage (pénuries possibles, faux sentiment de sécurité, possibilité qu’il soit mal porté) avant de faire volte-face. Du temps précieux a été perdu.

Or, il semble que la même logique frileuse ait été suivie pour les purificateurs d’air et les tests rapides. Les risques de les déployer, s’ils existent bel et bien, ne sont pourtant pas aussi critiques que ceux entourant la vaccination, par exemple.

Évidemment, dans ces deux cas, les rapports d’experts sauvent la mise. Ils ne recommandent pas le déploiement de ces solutions à grande échelle. Mais demandons-nous un instant ce qui serait arrivé si ces mêmes experts avaient tiré les conclusions inverses et recommandé l’emploi de ces technologies. On aurait conclu que Québec a tardé en ne profitant pas des vacances scolaires pour installer les purificateurs dans les classes et en laissant dormir dans des tiroirs pendant de précieuses semaines les tests rapides envoyés par Ottawa.

François Legault était probablement donc très soulagé de voir les recommandations négatives des deux rapports. On a parié sur l’inaction et, selon les experts québécois, on a gagné. La comparaison avec l’Ontario nous permettra peut-être de vérifier si ce verdict se confirme dans le temps. En attendant, gardons en tête que ces paris remportés cachent un risque : celui qu’on a pris à attendre de tout savoir pour décider.

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