Les récentes annonces de la ministre Geneviève Guilbault – dont les 52 millions de dollars annoncés dimanche pour prévenir la criminalité chez les jeunes – viennent mettre un baume sur ce 6 décembre qui aurait pu être rempli d’amertume. 

Souvenez-vous, à la commémoration du 25anniversaire de la tuerie de Polytechnique, la question du contrôle des armes à feu était au cœur des discours politiques. À l’époque, le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, promettait de reconstruire le registre des armes à feu. Lors du grand spectacle diffusé en direct du chalet du Mont-Royal, spectacle qui réunissait des politiciens de tous les horizons ainsi que deux animateurs de chaînes de télé concurrentes, on avait l’impression d’assister à un tournant historique. Tous ces gens réunis sous le même toit, porteurs d’une parole forte, avaient allumé un espoir presque aussi lumineux que les faisceaux blancs dressés sur la montagne à la mémoire des 14 victimes.

Sept ans plus tard, quelle douloureuse ironie de constater qu’au cœur de l’actualité québécoise se trouvent les deux fléaux contre lesquels des survivantes de Polytechnique luttent depuis 32 ans : le contrôle des armes à feu et la violence contre les femmes.

Depuis janvier dernier, 18 femmes ont été assassinées, présumément par leur conjoint ou leur ex-conjoint. Et l’année n’est pas terminée. Dans certains cas, les victimes avaient alerté leur entourage ou les forces de l’ordre qu’elles se sentaient en danger. On n’a pas su les protéger.

Ce 6 décembre a un goût d’amertume pour une autre raison : les armes à feu circulent comme jamais au Québec. On « imprime » des pièces en 3D, on les commande en morceaux par la poste, ou on en fait passer à la frontière.

Bien que l’auteur de la tragédie de Polytechnique – comme ceux de la tuerie de Dawson ou de la mosquée de Québec – ait utilisé des armes légales, la question de la possession et du contrôle des armes à feu demeure plus brûlante que jamais. Nous sommes témoins d’une banalisation qu’on s’explique mal, même si nous avons quelques pistes de compréhension.

En ce 6 décembre, alors que nous pensons aux 14 jeunes femmes tombées sous les balles, il y a toutefois des raisons de se réjouir.

Car depuis quelques mois, les choses bougent.

En avril dernier, la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, a annoncé une somme de 223 millions de dollars pour combattre la violence conjugale. De l’argent qui, de l’avis de bon nombre d’intervenants du milieu, est allé sur le terrain et a contribué à réduire les listes d’attente et à augmenter l’offre de service aux victimes ainsi qu’aux hommes violents.

Une autre raison de se réjouir : la mise sur pied d’un tribunal spécialisé en violences sexuelles et conjugales.

Puis, la semaine dernière, la ministre Guilbault a annoncé l’introduction des bracelets anti-rapprochement, une source de sécurité pour les femmes qui vivent dans la peur de voir apparaître leur ex-conjoint violent. Malheureusement, ce programme ne s’applique pas aux agresseurs qui auraient purgé une peine de deux ans et plus dans un pénitencier fédéral. On espère donc qu’Ottawa emboîtera le pas à Québec.

Finalement, dimanche, plus de deux mois après la mise sur pied de l’escouade Centaure qui lutte contre le trafic d’armes, la ministre Geneviève Guilbault a présenté son plan de prévention de la criminalité chez les jeunes.

Une réponse du gouvernement Legault aux demandes des groupes communautaires qui, au lendemain de l’assassinat de Thomas Trudel, ont souligné le manque de ressources pour intervenir auprès des jeunes. Leur message a été entendu à Québec, qui leur offre un financement récurrent sur quatre ou cinq ans, selon le programme. C’est un excellent début. Il faut souhaiter que ce financement ne soit pas qu’une simple réaction à une situation de crise, mais bien un acquis qu’on ne remettra pas en question dans cinq ans.

Est-ce que toutes ces mesures vont éradiquer la misogynie, la violence et la criminalité du jour au lendemain ?

Bien sûr que non. La prévention prend du temps. Mais ses effets durent plus longtemps.

Et en ce triste anniversaire, on peut dire que le Québec est sur la bonne voie.

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