Vous n’avez pas encore entendu parler d’ivermectine ? Grand bien vous fasse.

La substance a remplacé l’hydroxychloroquine dans la catégorie des remèdes miracles censés guérir la COVID-19.

Chez l’humain, l’ivermectine est utilisée pour lutter contre les poux et les vers parasitaires. Mais en Amérique du Nord, son usage est surtout vétérinaire. Nourris de fausses rumeurs, les gens en avalent donc des doses de cheval (littéralement).

En Alberta, les magasins d’aliments pour animaux sont débordés d’appels de gens à la recherche du médicament.

Aux États-Unis, des familles ont même réussi à forcer des hôpitaux à administrer de l’ivermectine à des proches atteints de la COVID-19 en s’adressant à des tribunaux. Que les avis de proches et de juges puissent court-circuiter ceux des médecins et des scientifiques est sidérant.

Certains devraient avoir trop honte pour se regarder dans le miroir. C’est le cas du populaire animateur de balados américain Joe Rogan, qui affirme s’être lui-même traité à l’ivermectine après avoir contracté la COVID-19. Ou de plusieurs commentateurs de l’ineffable chaîne Fox News qui en font la promotion.

Ces gens qui profitent de leurs tribunes pour jouer avec la santé du public font preuve d’une irresponsabilité inouïe.

On a ici tous les ingrédients d’une histoire moderne comme on en voit trop : mauvaise compréhension de la science, perte de confiance dans les institutions, certitude qu’on nous « cache quelque chose ». Le tout, bien sûr, amplifié par les chambres à écho des réseaux sociaux. Encore.

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Entendons-nous. Il n’est pas impossible qu’on découvre que l’ivermectine a bel et bien des effets contre la COVID-19. Mais pour l’instant, les preuves scientifiques sont faibles et contradictoires.

Certaines études montrent une réduction de la mortalité chez les malades, mais elles sont de petite taille et souvent mal réalisées. L’une des plus citées contenait des irrégularités. D’autres ne montrent rien.

De grandes études sont en cours pour tenter d’y voir clair. La chose à faire est évidente : attendre la fin du processus scientifique avant d’avaler le produit à n’importe quelle dose, sans supervision médicale.

Mais certains ont décidé qu’on ne nous dit pas tout. Les incohérences de leur discours sont bien sûr faciles à relever, mais il est néanmoins important de le faire.

Dans le grand délire de la « dictature sanitaire », plusieurs soutiennent que les gouvernements bloquent les médicaments qui fonctionnent pour prolonger ladite « dictature ».

Cette logique frappe le mur de plein fouet depuis que ces mêmes gouvernements offrent gratuitement des vaccins certes imparfaits, mais éminemment efficaces et sécuritaires contre la maladie.

Rejeter des produits soutenus par une tonne de données probantes pour en choisir d’autres dont l’état des connaissances est chambranlant est irrationnel.

C’est sans compter l’incohérence de dénoncer le lobby pharmaceutique (le méchant « Big Pharma ») quand il s’agit des vaccins de Pfizer… et d’oublier que c’est Merck, une entreprise qui a engendré 7 milliards US (8,8 milliards de dollars) de profits en 2020, qui a développé l’ivermectine.

Que faire face à des discours aussi déconnectés du réel ? Nous ne voyons rien d’autre que d’en exposer les contradictions et de continuer à combattre la désinformation par l’information. Une lutte lassante, qui expose parfois à des attaques. Mais qui s’avère plus nécessaire que jamais.

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