Ils étaient réclamés par plusieurs experts et observateurs, les voici enfin. Les tests rapides seront déployés dans les écoles primaires et secondaires, a annoncé mardi le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge.

Formidable ? Permettez-nous d’attendre un peu avant de danser d’enthousiasme. Parce qu’au moment où les élèves aiguisent actuellement leurs crayons et retrouvent leurs camarades de classe, les questions sans réponse sont encore désespérément nombreuses.

À quelle fréquence et dans quels cas les élèves seront-ils testés ? Quelle technologie sera favorisée ? Autorisera-t-on les élèves ou les profs à faire eux-mêmes les prélèvements ? Sinon, où trouvera-t-on les professionnels de la santé pour les effectuer ?

Malheureusement, il est toujours impossible d’obtenir des réponses claires à ces questions.

Cela laisse deux possibilités. Soit le gouvernement a un plan précis pour le déploiement des tests rapides à l’école, mais il est incapable de l’expliquer. Soit l’annonce de mardi relève de l’improvisation, ce qui serait vraiment troublant compte tenu du temps qu’on a eu pour se préparer et du fait que des millions de tests rapides dorment dans des entrepôts depuis près d’un an.

En conférence de presse, le DHoracio Arruda a ajouté une couche de confusion. À une journaliste qui lui demandait si les tests sur les élèves seraient effectués par le nez, le DArruda a répondu que la méthode du « gargarisme » serait favorisée.

Or, les tests antigéniques que possède le gouvernement requièrent un prélèvement nasal. Après un an et demi de pandémie, que le directeur national de santé publique s’emmêle les pinceaux sur une telle question laisse pantois.

Les tests rapides pourraient par ailleurs être également offerts au cégep et à l’université. Les jeunes, moins concernés par la COVID-19, n’ont pas tous le réflexe de se précipiter au centre de dépistage lorsqu’ils ont des symptômes.

Affirmer qu’on déploiera des tests rapides dans « certaines » écoles peut paraître suffisant. En réalité, il y a plusieurs façons de procéder, fort différentes dans leurs objectifs et dans les ressources qu’elles nécessitent.

Roxane Borgès Da Silva, de l’École de santé publique de l’Université de Montréal, propose de tester tous les élèves de deux à trois fois par semaine. Ceux-ci apprendraient à se tester eux-mêmes en utilisant un écouvillon dans les narines (à ne pas confondre avec le prélèvement nasopharyngé pratiqué dans les centres de dépistage, que les Québécois connaissent bien et qui est plus incommodant). L’experte convient que cela implique des ressources importantes. Mais elle plaide qu’avec la menace du variant Delta, les gains (réduction des absences scolaires, des hospitalisations, du délestage) seraient supérieurs.

Les tests laisseraient bien échapper bien certains cas, mais ils attraperaient les élèves les plus contagieux, donc les plus susceptibles de déclencher des éclosions. L’Allemagne et l’Autriche, notamment, ont suivi cette approche.

La Dre Caroline Quach, du CHU Sainte-Justine, propose plutôt de cibler les élèves symptomatiques. Un nez qui coule ou une quinte de toux en classe ? Hop, un test rapide. S’il est négatif, l’enfant peut rester à l’école, évitant au parent d’interrompre sa journée de travail. On demande ensuite une confirmation par test PCR effectué dans un centre de dépistage le lendemain.

La Dre Annie-Claude Labbé, microbiologiste-infectiologue au CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal, propose de réfléchir à une autre approche : des trousses comprenant de l’eau de source et un gobelet qui pourraient être distribuées aux familles, accompagnées d’instructions. En cas de symptômes, la personne pourrait faire elle-même un prélèvement en se gargarisant. Il ne s’agit pas d’un test rapide : l’échantillon serait ensuite acheminé au laboratoire pour obtenir le résultat, peut-être par l’entremise d’un point de dépôt. Mais on éviterait des déplacements aux enfants, et on aurait l’avantage de bénéficier d’un test plus fiable que le test rapide.

Chacune de ces approches nécessite de la préparation, un plan de déploiement, des ressources à mobiliser. Or, la rentrée, c’est maintenant. Il est plus que temps que le gouvernement clarifie ses intentions quant aux tests rapides à l’école.

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