Valérie Plante avait promis une piscine flottante sur le fleuve d’ici la fin de son mandat, même si on l’avait prévenue que le projet était « compliqué ». Et aujourd’hui, surprise ! Elle avoue que ça ne sera pas possible, car le projet est… « compliqué ».

Vous souvenez-vous du « bain portuaire » ?

C’était une priorité électorale de Valérie Plante : une piscine flottante pour le fleuve sur laquelle Projet Montréal avait beaucoup misé pour se démarquer. Ce projet, promettait la mairesse, allait voir le jour durant son tout premier mandat.

Eh bien, oubliez le bain.

La Presse a appris que l’administration Plante remettait l’ouverture du projet à 2022… ou à 2023. Au plus tôt. Soit un an après le prochain rendez-vous électoral.

Une promesse rompue, donc ? Hélas, oui.

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La Ville de Copenhague a construit, en 2003, un bain portuaire.

On nous explique au comité exécutif que l’idée d’un bassin flottant délimité par des quais était techniquement « beaucoup plus compliquée » à implanter que prévu. Il serait très difficile d’arriver à un concept à la fois sécuritaire et réalisable à un prix raisonnable.

On évoque aussi comme obstacles le courant du fleuve, les bateaux de croisière, la compétence fédérale sur le fleuve, la compétence du Port, les glaces dérivantes l’hiver, la grande variation annuelle du niveau d’eau, etc.

Soit. On ne doute pas que tout ça soit vrai.

Mais le parti qui a lancé l’idée en 2014 et qui en a fait un enjeu électoral en 2017 n’avait-il pas la responsabilité de creuser un peu avant d’en faire une priorité « avant la fin du premier mandat » ? Ou, à tout le moins, ne devait-il pas émettre les réserves qui s’imposent lorsqu’il en faisait mention ?

Que vaut une promesse électorale si on peut simplement s’en dédouaner sous prétexte que « c’est compliqué » ?

La question se pose d’autant plus que le projet avait été repris en 2015 par Denis Coderre après que l’ancien chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, se fut joint à son comité exécutif.

Le bain portuaire devenait alors un engagement à réaliser pour le 375e anniversaire de la ville, en 2017.

Et tant mieux si ce projet obtenait la faveur des grands partis politiques au conseil municipal ! Le bain portuaire (sorte de passoire qu’on immerge dans l’eau et qu’on entoure d’un quai de bois) a fait ses preuves à Copenhague. Et le quai de l’Horloge est un endroit parfait pour l’installer, car non seulement il y a déjà une plage de sable, mais la qualité de l’eau y est très bonne pour la baignade.

Mais en 2016, le projet est stoppé en raison de… sa complexité et de défis de sécurité. C’est Richard Bergeron lui-même qui avait alors levé le drapeau rouge.

Et pourtant, lors de la campagne électorale de 2017, Valérie Plante se faisait quand même la porte-étendard du projet, sans réserve. Elle promettait que sous sa gouverne « le bain portuaire pourra[it] voir le jour rapidement ».

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En 2018, des dizaines de personnes ont sauté dans le fleuve Saint-Laurent, au quai Jacques-Cartier du Vieux-Port de Montréal, afin de promouvoir un meilleur accès de la population au fleuve et à ses berges. La mairesse de Montréal, Valérie Plante, a participé à l’évènement.

Elle balayait alors d’un revers de main les défis techniques et ridiculisait son adversaire qui n’accordait pas assez d’importance au projet à ses yeux. Ce n’est qu’« une question de priorité » et de « volonté politique », avait-elle dit.

Eh bien, aujourd’hui, l’administration Plante évoque… des « défis techniques » pour justifier que les Montréalais ne pourront se baigner avant les prochaines élections. À peu près les mêmes « défis » évoqués par son prédécesseur qu’elle avait tournés en dérision lors des élections !

Soupir.

Comme réaction, on hésite entre la résignation et le découragement.

Combien de promesses électorales servent simplement à faire mal paraître son adversaire ?

Combien d’engagements sont lancés sans grande analyse, en se disant qu’on verra une fois au pouvoir ?

Le problème ici n’est pas qu’une promesse se soit avérée plus complexe que prévu, ça arrive. Le problème, c’est que pour faire des gains électoraux, on a fait semblant que cette complexité n’existait pas.

C’est bien dommage, car voilà une activité estivale qui aurait pu attirer les Québécois en ces temps de crise sanitaire. Mais c’est dommage, surtout, car voilà un autre engagement électoral rompu, comme tous ceux qui ont accru le niveau de cynisme ces dernières années, au municipal et ailleurs.

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