Microbiologistes qui développent un vaccin. Épidémiologistes et chercheurs en santé publique qui éclairent la gestion de crise. Informaticiens et mathématiciens qui conçoivent une application pour tracer les gens à risques, et éthiciens qui mettent en garde quant aux risques pour la vie privée.

Ces épisodes de la lutte contre la COVID-19 rappellent l’importance des institutions d’enseignement supérieur pour notre société. Pourtant, les universités et cégeps étaient loin des priorités politiques dans les dernières années.

Voilà pourquoi on se réjouit de la nomination de Danielle McCann comme ministre de l’Enseignement supérieur. Elle arrive à un excellent moment : juste avant la rentrée en temps de pandémie, et juste avant le dépôt d’un rapport sur l’avenir des universités.

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Le premier défi de la nouvelle ministre de l'Enseignement supérieur, Danielle McCann, sera de gérer la rentrée qui se fera en partie à distance.

Le simple fait qu’une ministre s’occupe à temps plein du réseau constitue un soulagement.

Auparavant, le ministre Jean-François Roberge était à lui seul responsable de tout le système d’education, de la maternelle jusqu’au doctorat. C’est immense.

Monsieur Roberge était débordé par deux réformes complexes, soit l’abolition des commissions scolaires et la maternelle 4 ans pour tous. Il restait peu de temps pour les cycles supérieurs, un réseau que cet ancien enseignant au primaire connaît moins bien.

Il serait injuste d’accuser M. Roberge de n’avoir rien fait. Le ministre a réformé le financement des cégeps, pour aider les établissements en région. Et il a créé un groupe de travail sur l’avenir de l’université, qui doit bientôt déposer son rapport – des consultations suivront à l’automne.

Certes, ce n’est pas la première grande réflexion à ce sujet. Il y a eu les rapports Bissonnette-Porter (2013) et Corbo (2017), mais le gouvernement libéral n’y avait pas donné suite. Son impact se mesure surtout aux compressions qui ont fragilisé les cégeps et universités. Il a fallu attendre la fin de leur mandat, en mai 2018, pour voir le dépôt d’une politique de financement des universités.

À court terme, le défi de Mme McCann sera la rentrée avec l’enseignement en partie à distance. Pour cela, elle peut apprendre des erreurs de M. Roberge lors de la première vague.

La clé : garder les directives prévisibles. Les changer le moins souvent possible, et avec un maximum de préavis pour donner la chance à tous de se préparer.

À moyen et long terme, le rapport sur l’université du futur devrait inspirer la nouvelle ministre pour renforcer les universités. Certes, on ignore encore les recommandations qui en émaneront. Mais on note à tout le moins que les travaux semblent bien lancés – le comité est représentatif, grâce à la participation de professeurs, étudiants, recteurs et de spécialistes en éducation.

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Mme McCann ne devrait pas s’en tenir qu’à cela. Espérons qu’elle se mêle aussi des dossiers de ses collègues pour faire valoir le rôle de l’enseignement supérieur dans la relance économique, l’immigration et la recherche.

Pour stimuler l’économie, elle pourrait donner plus de souplesse aux cégeps afin d’ajuster leurs programmes techniques aux besoins locaux en main-d’œuvre, sans rogner sur la nécessaire formation générale.

Pour l’immigration, Mme McCann devrait défendre le cœur du Programme de l’expérience québécoise, qui attire les étudiants étrangers, tout en promouvant davantage les séjours à l’international de nos jeunes. Aussi, malgré les récents progrès, les ordres professionnels pourraient en faire plus pour intégrer les nouveaux arrivants au marché du travail.

Enfin, il y a l’innovation. Même si le dossier relève du ministre de l’Économie, Mme McCann pourrait s’en mêler. Dans la prochaine Stratégie de la recherche et de l’innovation, elle devrait veiller à préserver l’équilibre entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée. N’oublions pas que Yoshua Bengio, chercheur vedette qui attire des investissements étrangers en intelligence artificielle, a passé de nombreuses années à travailler sur des projets jugés à l’époque inutiles…

Comme ministre de la Santé durant la pandémie, Mme McCann a constaté chaque jour l’importance du savoir pour éclairer les décisions. Même si ce n’était pas son choix, sa nouvelle fonction lui donne l’occasion de poursuivre à sa façon ce travail.

Un prix de consolation ? Peut-être. Mais c’est surtout une lourde responsabilité.

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