Les travaux parlementaires sont suspendus, à Québec, depuis la mi-mars. Les trois groupes parlementaires d’opposition estiment qu’il va falloir bientôt remettre la machine en marche et ils viennent de le faire savoir publiquement.

On voit mal comment on pourrait leur donner tort.

Leur argument central est irréfutable : les décisions qui seront prises par le gouvernement de la CAQ à court terme auront des impacts durables.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Les leaders parlementaires des trois groupes d'opposition, Marc Tanguay, Martin Ouellet et Gabriel Nadeau-Dubois, entourent Simon Jolin-Barrette, du gouvernement.

Elles « détermineront ce que sera le Québec dans les prochains mois, voire les années à venir », ont résumé les trois leaders parlementaires des partis d’opposition dans une lettre expédiée à Simon Jolin-Barrette lundi.

Bien sûr qu’il fallait que les partis d’opposition acceptent, le mois dernier, de suspendre les travaux en raison de la crise. La fin, parfois, justifie les moyens.

Les mesures de distanciation physique empêchaient les députés de siéger à l’Assemblée nationale. Et toutes les énergies du gouvernement – celles de la nation, en fait – devaient être tournées vers la crise.

Mais la courbe étant en train de s’aplatir, la société québécoise se trouvant à l’orée du pic tant attendu, l’après-crise se préparant, il est l’heure de planifier une reprise de certaines (le mot « certaines », ici, est important) activités parlementaires.

Attendre que les autorités de santé publique donnent le feu vert à une réouverture de l’Assemblée nationale pourrait nous mener loin… trop loin. Des solutions de rechange existent. Et il serait périlleux de laisser perdurer cette situation exceptionnelle.

Comprenons-nous bien : les députés ne sont pas des plantes vertes depuis le début de cette crise. Ils l’ont dit eux-mêmes, ils ont l’impression que tous les élus à Québec font partie de la même équipe. C’est aussi rare qu’opportun.

L’attitude d’ouverture de la CAQ y contribue. Parallèlement à son point de presse quotidien, le premier ministre s’entretient avec les trois chefs des partis d’opposition deux fois par semaine. Et certains ministres ont eux aussi des échanges formels avec des députés de l’opposition.

N’empêche, la reddition de comptes n’est pas optimale. Le défi, maintenant, sera de trouver un mécanisme qui va permettre de concilier le fait que l’urgence absolue n’est pas de relancer les travaux parlementaires, mais que leur reprise est néanmoins une nécessité.

Équation impossible à résoudre ?

Moins qu’il n’y paraît.

L’opposition, qui se comporte dans ce dossier avec le respect et la modération dont elle a toujours fait preuve depuis le début de la crise, a proposé une formule novatrice.

Elle se traduirait par quelques heures d’échanges virtuels publics entre certains ministres et une poignée de députés chaque semaine.

Une telle initiative éviterait « de monopoliser l’agenda des ministres », fait valoir l’opposition. C’est fondamental.

Un autre avantage – et non le moindre – est qu’on se rapprocherait plus de la formule d’une commission parlementaire, où les débats sont souvent constructifs, et moins de la période des questions, où les échanges acrimonieux sont monnaie courante.

L’exercice sera délicat. L’enfer, on le sait, est pavé de bonnes intentions. Miner la confiance des citoyens à l’égard du gouvernement par pure partisanerie serait irresponsable. Mais il ne faut pas, non plus, abandonner tout examen public des actions et des décisions gouvernementales pour autant.

Des dérives de la part de l’opposition sont possibles, direz-vous ? Peut-être. Mais il y a fort à parier que l’opinion publique, à l’heure du coronavirus, sera sans pitié pour ceux qui tenteraient cyniquement d’en profiter dans le seul but de se faire du capital politique.

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