Dans un discours qu'il prononce aujourd'hui en Thaïlande et dont la Maison-Blanche a remis à l'avance le texte aux journalistes, le président George W. Bush sermonne la Chine au sujet des violations des droits humains.

Avant de s'envoler pour Pékin où il assistera demain à l'ouverture des Jeux olympiques, M. Bush déclare que les États-Unis «s'opposent fermement à la détention de dissidents politiques, de défenseurs des droits de la personne et de militants religieux». «Nous prônons la liberté de La Presse, la liberté de réunion et le respect des droits des travailleurs, non pour antagoniser les dirigeants chinois, mais parce que la Chine atteindra son plein potentiel seulement si elle fait suffisamment confiance à sa population pour lui accorder une plus grande liberté», a expliqué le président américain.

En Occident, tout le monde sera d'accord avec le message: il serait éminemment souhaitable que le gouvernement chinois respecte davantage les droits fondamentaux de ses citoyens. Mais dans le cas de cette déclaration de M. Bush, l'identité du messager pose problème. En effet, les États-Unis d'Amérique ont rarement été aussi mal placés pour faire la leçon aux autres pays de la planète au sujet des droits de l'homme. C'est sous George W. Bush que des militaires américains ont systématiquement maltraité les détenus de la prison d'Abou Ghraib. C'est sous George W. Bush que des centaines de présumés «combattants ennemis» ont été détenus sur la base de Guantanamo sans qu'on sache de quoi ils étaient accusés. C'est sous George W. Bush que Washington, pour justifier l'invasion de l'Irak, a manipulé La Presse américaine dont le président ose aujourd'hui vanter la liberté. Enfin, les États-Unis partagent avec la Chine le douteux honneur d'être parmi les pays où la peine de mort est le plus souvent infligée: 42 exécutions aux États-Unis en 2007, 470 en Chine.

Quand des journalistes lui ont demandé cette semaine si le gouvernement chinois respectait ses engagements en matière de droits de la personne, le premier ministre canadien, Stephen Harper, a été plus diplomate que M. Bush. «J'espère qu'avec le temps, la tenue des Jeux en Chine aura l'effet désiré», s'est-il contenté de dire.

Cette prudence est heureuse, M. Harper étant également mal venu de sermonner les Chinois, lui qui au mieux n'a manifesté qu'indifférence à l'égard de la République populaire. Depuis son arrivée au pouvoir, le premier ministre fédéral ne s'est toujours pas rendu en Chine. Jean Charest lui, premier ministre provincial, en est à sa deuxième visite en trois ans.

Les Occidentaux ont non seulement le droit mais le devoir de pousser les Chinois à respecter davantage les droits humains. Toutefois, il leur faut le faire de façon intelligente, en tenant compte de l'histoire et de la culture de la Chine, en gardant à l'esprit le défi inouï que constitue la modernisation d'un pays de 1,3 milliard d'habitants. Les dirigeants occidentaux doivent aussi avoir la modestie d'admettre que leur propre bilan en matière de droits de la personne n'est pas sans tache, en particulier dans le cas des États-Unis.

Seul le dialogue, engagé avec sincérité, respect et persévérance, nous permettra de faire valoir notre point de vue auprès des dirigeants chinois.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion