Québec, on l'a vu, ne participera pas au nouveau système national de dons d'organes. Mais les patients, malgré ce qu'on a pu entendre cette semaine, n'ont pas à s'inquiéter. Cette décision politico-administrative n'allongera pas les délais.

Tous les malades en attente d'une greffe le savent: le nombre de reins, de foies et de coeurs prélevés chaque année ne suffisent pas aux besoins. C'est vrai dans tous les pays industrialisés comme dans toutes les provinces canadiennes. La gestion nationale des dons comporte des avantages, mais ça ne fera pas apparaître des organes par magie. Les patients ne seront donc pas pénalisés si leur province s'exclut de cette structure administrative.

Le geste est essentiellement politique. C'est le gouvernement et non Québec-Transplant, l'agence de coordination des dons d'organes, qui a décidé de faire cavalier seul. Québec, comme on le sait, tient mordicus à exercer ses compétences en matière de santé. Sauf qu'en pratique, ça ne change pas grand-chose.

Les provinces, en effet, collaborent déjà beaucoup entre elles. Si les jours d'un Québécois en attente d'un coeur sont comptés, il recevra une greffe en priorité, même si l'organe a été prélevé en Ontario. L'inverse est aussi vrai. Une vingtaine de Québécois ont ainsi reçu des organes d'autres provinces l'an dernier, alors que près de 30 patients du reste du Canada ont survécu grâce à des donneurs québécois - les chiffres varient beaucoup d'une année à l'autre. Ce réseau d'échange fonctionne déjà dans tout le pays.

Le nouvel organisme national aura plutôt un rôle de facilitateur. La liste des patients prioritaires, actuellement gérée par téléphone et par télécopieur, sera informatisée et disponible en temps réel. D'autres registres pourraient être créés, notamment pour que les donneurs potentiels puissent officialiser leur volonté.

Personne ne s'attend à ce que le Québec boude dans son coin. Québec-Transplant deviendra simplement un interlocuteur du système national, au lieu d'en être une composante. Un rapport semblable existe déjà entre Héma-Québec et son homologue fédéral, la Société canadienne du sang. Et la Société, qui gèrera aussi les organes, se montre très satisfaite de la relation. Il faut toutefois s'attendre à ce que les autres provinces, qui auront financé la création des registres informatiques, demandent à Québec de payer pour les utiliser. C'est tout à fait légitime.

La Société canadienne du sang veut aussi augmenter le nombre d'organes prélevés, en finançant notamment des campagnes de sensibilisation et de formation auprès du personnel hospitalier. Le Québec en profitera par ricochet. Car même si nous avons le taux de donation le plus élevé au pays, il y a encore place à l'amélioration. Selon le Collège des médecins, nous pourrions avoir jusqu'à 30 donneurs par million d'habitants, soit une augmentation de plus de 60% par rapport à la situation actuelle. Mais pour cela, il faudrait améliorer certaines façons de faire dans les hôpitaux, et mieux informer la population. Près d'une famille sur quatre refuse qu'on prélève les organes d'un proche qui vient de mourir. La douleur et les convictions de toutes natures pèsent évidemment très lourd dans ce genre de décision. Toutefois, si les gens étaient mieux préparés à se faire poser une telle question, ils seraient sans doute plus enclins à y répondre par l'affirmative.

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