Plusieurs vieux libéraux n’en sont tout simplement pas revenus. Le Parti libéral du Québec a mis en ligne une page sur son site web permettant de postuler pour une investiture ou même de suggérer des gens qu’on pourrait solliciter pour se présenter aux prochaines élections.

Officiellement, c’est de l’innovation, c’est de l’ouverture et de la transparence, c’est « faire de la politique autrement ». Dominique Anglade l’avait promis pendant la course au leadership.

Mais pour beaucoup, ce recrutement sur l’internet, c’est un signe de détresse ou même de panique.

Le site web est vraiment didactique et destiné à des gens qui ne savent pas grand-chose de la politique. Comme le fait qu’il faut avoir sa carte de membre du Parti libéral pour pouvoir se présenter. Ce qui montre qu’on ne pêche pas précisément dans le bassin où on essaie, normalement, de trouver ses futurs députés.

Consultez l’appel aux candidatures du PLQ

Évidemment, il y a plein de circonstances atténuantes, à commencer par la pandémie qui a réduit presque à néant la vie interne des partis politiques et le militantisme. Le PLQ, qui a déjà eu jusqu’à 200 000 membres en règle, n’en avait plus que 20 000 lors de sa course au leadership, il y a deux ans.

Mais ce qu’un appel public aux candidatures révèle surtout, disent de vieux militants libéraux, c’est la faiblesse des associations de circonscription. Normalement, ce sont les militants au niveau local qui recherchent ceux ou celles qui pourraient être candidats et être bien au fait des enjeux locaux.

Et quand le parti décide de parachuter une vedette de l’extérieur, le plus souvent quelqu’un d’éminemment « ministrable », on explique à l’association locale que le parti a besoin de cette personne et, le plus souvent, les militants locaux se chargent de l’accueillir et de le mettre au fait des particularités locales.

Le signal qu’envoie le site web des investitures, c’est que plusieurs associations de circonscription n’ont plus les ressources pour jouer un rôle très actif dans le recrutement de candidats. Ce qui donne à penser qu’on est plus dans la détresse que dans l’innovation.

Mais à quoi peut-on attribuer cette détresse ? Évidemment, il y a la pandémie qui n’est pas très propice aux débats politiques sur le plan local, mais aussi au plan national.

Le gouvernement Legault prend tout l’oxygène disponible. Il gouverne par conférences de presse, là où il est seul à exposer son point de vue et où l’opposition est absente. Et quand les médias vont demander des réactions, ils vont plus souvent le faire dans la société civile plutôt que d’interroger les partis de l’opposition.

Et, il est évident que le mariage de Dominique Anglade avec le PLQ ne s’est pas déroulé dans les meilleures circonstances. La malchance a fait que Mme Anglade a été élue par acclamation et donc, sans une grande participation des militants libéraux. Même quand elle avait un adversaire, les débats devaient se tenir de manière virtuelle, ce qui a nui à la mobilisation des membres.

Il y a aussi des raisons plus profondes.

Le PLQ a très longtemps vécu et même incarné le débat entre fédéralistes et souverainistes. C’était son véritable fonds de commerce, bien plus même que le développement économique.

Pendant la décennie des années Charest, le PLQ pouvait se contenter de dire le mot « référendum » pour gagner des élections. C’était simple et efficace. Le parti pouvait faire l’économie des grands débats d’idées et s’est souvent contenté d’être une machine à collecter de l’argent pour la caisse électorale, avec tous les effets secondaires néfastes que cela a comporté. Mme Anglade a hérité d’un parti qui avait de très graves problèmes.

Mais cela étant dit, il reste que le meilleur moyen d’attirer des candidatures intéressantes est encore d’avoir de bons sondages et une possibilité de former le prochain gouvernement. Or, le PLQ est désespérément stable à 20 % des voix – et encore moins dans le vote francophone – depuis des mois et est très loin de la zone où un parti peut aspirer à gagner les prochaines élections.

Mais si le PLQ – ou tout autre parti – voulait faire œuvre utile, il pourrait réfléchir à la façon dont on choisit les candidats. On pourrait commencer par éliminer la possibilité que les courses à l’investiture deviennent un concours de ventes de cartes de membres du parti. Ça permet le plus souvent au meilleur organisateur de contrôler l’investiture, l’association de circonscription, voire le député. Les « conventions ouvertes » ne sont, le plus souvent, que des affaires d’organisation.

Ça s’apparente trop à la façon dont on choisissait, jadis, les duchesses du Carnaval, avec la différence qu’il s’agissait alors de vendre des bougies. Si on a jugé que c’était un processus dépassé pour les duchesses, il serait plus que temps de penser à un autre mécanisme pour le choix des candidats députés.