Il y a un peu plus d'un mois, nous avions incité le chef du Parti libéral du Canada, Michael Ignatieff, à faire preuve de courage et à préciser ses mesures d'engagement pour réparer et améliorer le régime d'assurance emploi. Force est de constater que notre appel a été entendu et que les propositions exprimées publiquement par le chef du PLC sont de haut niveau.

D'aucuns seront dérangés par cette proposition (d'uniformiser à 360 le nombre d'heures de travail requis), et seront tentés de faire le procès passé des libéraux. D'autres, à l'instar de l'éditorialiste en chef de La Presse, André Pratte, prétendront qu'il s'agit «d'une proposition téméraire et irréfléchie», qu'il y a lieu de «prendre garde à ne pas faire des changements improvisés ou trop coûteux». Quant à la position du gouvernement Harper, elle est insignifiante et sans coeur.

 

Nous avons été artisans de ces rapprochements avec les libéraux, et de la mise en place de très larges alliances au sein de la société pour favoriser les changements désirés. Si nous avons été au-devant de tous les combats menés contre les compressions imposées au régime d'assurance emploi depuis 1993, nous avons aussi proposé des éléments de solution. Plus particulièrement, et cela depuis quelques années, nous avons tendu la main aux libéraux, dans un esprit de réconciliation fondé sur la vérité et sur la justice.

Il n'est pas juste de considérer la position libérale comme étant irréfléchie, téméraire, trop coûteuse. Chaque année, le régime d'assurance emploi module la vie de centaines de milliers de travailleurs, pris entre deux emplois. Malheureusement, une majorité de chômeurs n'arrivent plus à se qualifier à l'assurance emploi: depuis 1996, la couverture du régime (le ratio prestataires-chômeurs) est tombée en dessous des 50%, justement à cause du resserrement des critères d'admissibilité. Les premières victimes sont les travailleurs à statut précaire.

On ne compte plus les voix qui réclament une meilleure admissibilité à l'assurance emploi: le Conference Board du Canada, l'Institut CD Howe, de nombreux économistes québécois et canadiens, hommes et femmes politiques, comme les premiers ministres du Québec et de l'Ontario, observateurs et commentateurs, groupes de femmes, syndicats... Combien d'articles et d'éditoriaux, que nous pourrions résumer dans cette formule éclairée, celle de Mario Roy dans La Presse du 13 décembre 2008: «La façon élégante, juste et efficace de régler le dossier sera sans doute de bonifier le régime d'assurance emploi, notamment en décadenassant l'accès aux prestations.»

Il n'y a rien d'improvisé dans la position libérale qui s'affirme comme une position courageuse, en phase avec la société, en phase avec les besoins criants, avec les demandes et avec les majorités qui s'expriment. En phase aussi avec ce concept de solidarité sociale qui se retrouvait au coeur même du Livre blanc de Brice Mackasey pour un meilleur régime d'assurance-chômage, sous le gouvernement Trudeau, en 1971.

Comprenons aussi une chose: les coûts d'un tel chantier seront assumés, sans défaut, par les seules cotisations des travailleurs et des employeurs, considérant que le gouvernement ne finance plus la caisse d'assurance emploi depuis la fin des années 80. La caisse continue d'ailleurs à enregistrer des surplus, et s'il le fallait, une hausse de seulement 10 sous affecterait des revenus d'environ 1 milliard de dollars.

L'assurance emploi doit redevenir un programme qui assure la sécurité économique, et donc la dignité, des travailleurs qui perdent leur emploi et qui se retrouvent temporairement en situation de chômage. La seule partisannerie que nous connaissons est là. C'est pourquoi nous n'hésitons pas à saluer la prise de position de M. Ignatieff, et à l'encourager dans cette voie.

L'auteur est porte-parole du Conseil national des chômeurs (CNC).