Sous prétexte d'accidents trop nombreux, la Société du parc Jean-Drapeau souhaite imposer une limite de vitesse aux amateurs de cyclisme qui roulent sur le circuit Gilles-Villeneuve. En somme, les cyclistes qui s'y entraînent ne sont plus les bienvenus!

Sous prétexte d'accidents trop nombreux, la Société du parc Jean-Drapeau souhaite imposer une limite de vitesse aux amateurs de cyclisme qui roulent sur le circuit Gilles-Villeneuve. En somme, les cyclistes qui s'y entraînent ne sont plus les bienvenus!

Quelle idée tout de même! Depuis des années, le circuit est le rendez-vous cycliste par excellence de tous les mordus de vélo. Ce lieu culte, est le seul endroit sur l'Île où la chaussée ne risque pas de nous déjouer à coups de nids de poule, où l'on peut rouler sans craindre de se faire bousculer par un automobiliste qui ne souhaite pas partager sa chaussée. Le seul endroit où on est sûr d'être à la fois libre et en sécurité, un lieu unique pour se dépenser sans avoir à se déplacer hors de la ville. Une ellipse urbaine où de nombreux sportifs se rencontrent pour partager une passion commune.

La Société du parc Jean-Drapeau rapporte 27 accidents survenus l'an passé. Il n'y en aurait qu'un que ce serait un de trop. Mais peut-on vraiment s'immuniser contre le risque? Qui veut-on satisfaire? À qui veut-on plaire? La limitation de vitesse prônée par l'organisme montre, encore une fois, ce rapport infantilisant que nous entretenons avec l'autorité. Combien d'interdictions faut-il avancer pour s'épargner le danger? Le risque ne fait-il pas implicitement partie de la vie? Il est certes vertueux de vouloir agir pour le bien-être de la majorité. Les cyclistes qui empruntent chaque jour le circuit pour s'entraîner ne sont pas majoritaires. D'accord. Mais au nom de la liberté de penser, peut-on arrêter de démarcher à coups d'interdits? Peut-on croire au jugement des citoyens et veiller au bien commun en prônant la sensibilisation plus que l'interdiction?

Plutôt cette année la ministre Courchesne parlait de son désir de stopper les batailles dans la LHJMQ. Noble et vertueux, ce souhait n'est possible selon moi que si l'on apprend aux jeunes à réfléchir plutôt qu'à obéir. L'obéissance sans réflexion est un cul-de-sac. Pourquoi tenter d'éteindre la fougue de jeunes hockeyeurs passionnés à coups de morale et d'interdictions sans réflexion? Ne vaut-il pas mieux saisir l'occasion pour raisonner et sensibiliser ces jeunes qui ne demandent qu'à apprendre et à s'améliorer?

Il en va de même pour les cyclistes. Pourquoi tenter de les mettre au pas et d'éteindre leur mode d'expression? Pourquoi ne pas plutôt valoriser l'activité sportive tout en prônant le respect des pairs? Avant de se rabattre sur l'interdit, n'a-t-on pas le devoir de passer un message de sensibilisation pour faire évoluer les mentalités?

Il faudrait arrêter une fois pour toute de se déresponsabiliser et de remettre aux mains de l'état et des autorités la sécurité des citoyens! Sur la route, les pentes de ski, en voiture ou sur deux roues, il y aura toujours un risque potentiel. Mais ce risque ne se conjugue pas au pluriel! Ce n'est pas le comportement de la majorité qui teinte les activités de danger. C'est les excès d'une minorité qui nous amène à réglementer. Il est dommage d'éteindre la liberté de la majorité au nom d'un semblant de sécurité. Et de toute façon même devant la loi, les règles et les interdictions, il y aura toujours un risque et des gens pour enfreindre les règlements.

Avec le désir de la Société du parc Jean-Drapeau de veiller à la sécurité de la majorité, la métropole perd un lieu culte de rassemblement sportif. Le comble de l'absurdité dans une société qui tente de valoriser l'activité physique et le dépassement de soi. Il ne manquerait plus que les Amis de la montagne nous confisquent Camilien Houde! On se rabattra peut-être sur le Bixi et du coup, la ville aura les moyens de ses ambitions, des sous pour réparer nos routes qui sont plus dangereuses que n'importe quel cycliste qui s'entraîne sur le circuit!

L'auteure réside à Montréal.