Désirée, qui vit à Cité Soleil - un quartier de Port-au-Prince -, est mère de trois enfants. Elle en avait quatre, mais la petite Elizabeth n'est plus : elle est morte du choléra l'année dernière. Des histoires comme celle de Désirée, il y en a tellement en Haïti que plus personne ne s'en indigne, alors que c'est inacceptable et que nous devrions tous être révoltés.

Pourtant, il n'y a rien de plus facile à soigner que le choléra : hydratation, hydratation, hydratation ! De l'eau, du sel et du sucre suffisent à traiter une personne lorsqu'elle présente des diarrhées d'intensité modérée. Et lorsque les symptômes persistent ou s'aggravent, elle doit alors être placée sous perfusion intraveineuse dans un centre de traitement du choléra.

Après trois jours de ce régime, on repart sur ses deux pieds, en bonne santé, sans séquelles. Mais si le choléra n'est pas soigné à temps, on peut en mourir - parfois en moins de 24 heures. C'est ce qui est arrivé à Elizabeth.

C'est inacceptable, lorsqu'on sait que ce fléau est si facile à prévenir en appliquant des règles d'hygiène de base :  se laver les mains, en tout premier lieu, et vivre dans un environnement sain et salubre.

Le traitement et ces précautions qui peuvent paraître simples demandent toutefois un travail laborieux et méticuleux pour déterminer l'origine de chacun des cas, une mise en place d'infrastructures permettant l'accès à l'eau potable et des conditions sanitaires minimales ainsi qu'un travail de longue haleine pour permettre un changement profond des mentalités.

C'est inacceptable, lorsqu'on constate que le choléra, toujours endémique, est maintenant relégué dans l'oubli.

Dans l'urgence, au début de l'épidémie en 2010, des centres de traitement du choléra ont été mis sur pied, et de vastes campagnes de sensibilisation ont été déployées. Ces efforts avaient portés leurs fruits, puisque l'épidémie a pu être contenue.

Or, aujourd'hui, les fonds humanitaires alloués à la prévention et au traitement du choléra s'atrophient dans la mesure où de nouvelles crises sont devenues prioritaires - ce qui est compréhensible. Ce qui l'est moins, en revanche, c'est que la communauté internationale ne libère pas les fonds nécessaires afin d'appuyer le plan d'action pour l'éradication du choléra d'ici 2022.

En outre, la persistance de cette crise est symptomatique de l'ensemble des nombreux défis auxquels l'État haïtien fait face, dont la difficulté à offrir un accès aux soins de santé adéquat à sa population.

L'ONU RECONNAÎT SON RÔLE

Considérant cette situation, Médecins du monde, qui est l'un des acteurs majeurs dans la réponse à l'épidémie de choléra en Haïti, accueille favorablement la reconnaissance par l'Organisation des Nations unies de son implication dans le déclenchement de l'épidémie de choléra en Haïti, de sa responsabilité morale d'aider Haïti à surmonter l'épidémie de choléra et à construire des systèmes d'eau, d'assainissement et de santé solides.

En dépit des difficultés et des défis qui se présentent, et, quels que soient les rôles des uns et des autres dans cette épreuve, il faut redoubler d'efforts pour éradiquer le choléra en Haïti une fois pour toutes en effectuant des investissements majeurs dans les systèmes d'eau, d'assainissement et les services de santé.

C'est une responsabilité collective qui appelle un travail conjoint entre les Nations unies, les bailleurs de fonds, le ministère de la Santé publique et de la Population d'Haïti, la société civile et les ONG internationales.

Désirée et sa famille ainsi que tous les autres Haïtiens à risque méritent beaucoup plus que des aveux prononcés du bout des lèvres...

Young boys look for fish in a basin of polluted water in Delmas, a neighborhood of Port-au-Prince, Haiti, Friday, Aug. 19, 2016. Haiti is the poorest country in the Western hemisphere and only 24 percent of Haitians have access to a toilet. Sewage is rarely treated and safe water remains inaccessible to many. ( AP Photo/Dieu Nalio Chery)