Chers membres du Parti québécois,

Après ce premier débat de la course à la direction, avouez que vous vous ennuyez un peu de Jean-François Lisée. Avouez que tout ce que vous lui avez reproché l'automne dernier servirait bien notre parti aujourd'hui. Avouez que s'il avait été présent lors du débat de Trois-Rivières, on se serait pas mal moins ennuyé.

Entre un Pierre Karl Péladeau qui, stratégiquement et sans surprise, évite de répondre aux questions qui lui sont posées, un Bernard Drainville qui commence trop de phrases par «en tout respect pour ce que tu viens de dire...», une Martine Ouellet qui arrive mal à justifier sa deuxième position des derniers sondages malgré des positions intéressantes, et un Alexandre Cloutier que n'importe quelle jeune première aimerait présenter à ses parents: un Jean-François Lisée avec des gants de boxe aurait été bien rafraîchissant.

Mais au-delà d'être rafraîchissant, Jean-François Lisée aurait parlé vrai, il aurait pointé les éléphants dans la pièce, il aurait posé les vraies questions, franches et directes. Il aurait fait ressortir ce que les candidats ont réellement dans les tripes. En somme, il aurait donné, de façon peut-être pas toujours habile ou gentille, les électrochocs dont notre parti a bien besoin.

Ça c'est le côté givré, celui qui plaît beaucoup aux journalistes. Mais en plus, monsieur Lisée a aussi un côté sérieux qui aurait lui aussi contribué au débat. Malgré ce qu'en pense un certain maire du Saguenay, les intellectuels ont beaucoup à apporter à notre société. Et lors de la seule sortie de contenu qu'il a eu le temps de faire durant la période précédant la course à la direction (sur le pétrole), il a démontré sa capacité de creuser intelligemment des sujets au lieu de seulement «surfer» sur des formules tarte aux pommes.

Après ce débat qu'on peut à peine affubler de cette appellation, et après les prochains qui se ressembleront, les chances sont grandes que notre parti se retrouve au même point qu'avant la dernière élection. À peu près les mêmes positions sur les sujets importants (éducation, santé, culture, développement économique...) avec un nouveau chef à sa tête.

La prochaine fois qu'un «Jean-François Lisée» n'a pas la langue dans sa poche - parce que, n'en doutez pas, nous sommes au Parti québécois, ça va se reproduire - , je vous invite à soupeser la valeur des propos avant de condamner.

Et si vous cherchez un parti qui ne contredit jamais ses chefs, il y a sûrement de la place au Parti conservateur ou au Parti libéral du Québec.