On attend avec impatience le rapport de la Commission d'examen sur la fiscalité chargée par le gouvernement de trouver un meilleur équilibre entre impôt, taxes et tarification des services de l'État. Luc Godbout, son président, déclarait en décembre vouloir «encourager davantage le travail et l'épargne [...] tout en assurant une redistribution équitable de la richesse».

Si c'est le cas, M. Gobdout n'a d'autre choix que de recommander qu'on mette fin à certaines injustices de notre système fiscal qui avantagent les boursicoteurs et les grandes entreprises. Au moment où l'austérité budgétaire fragilise l'économie québécoise, des contribuables très fortunés et des entreprises milliardaires continuent de jouir de privilèges fiscaux injustifiables.

Rétablir l'équité entre revenu de salaire et revenu de capital

Chaque dollar travaillé compte dans le calcul d'impôt des salariés. Mais pour les gains en capital ou les revenus de dividende, le fisc ne compte qu'un dollar sur deux! Une salariée qui a un revenu brut de 75 000$ paye 11 540$ d'impôt. Or, pour un revenu brut de 200 000$ provenant de placements en bourse, un riche payera à peine plus qu'elle (13 240$).

La moitié de ces 200 000$ est libre de tout impôt. Résultat: la travailleuse paye deux fois plus d'impôt en proportion de ses revenus que le riche qui a des placements, alors qu'elle gagne trois fois moins d'argent. C'est inacceptable.

Si la commission Godbout veut «encourager davantage le travail et l'épargne» de la majorité, Québec solidaire propose d'inclure la totalité des revenus de capital dans le calcul des impôts, excepté pour le gain en capital provenant de la vente de la résidence principale, qui resterait déductible à 100%. Ainsi, les citoyens qui vendront leur résidence n'auront pas à payer d'impôt sur le bénéfice de vente de celle-ci.

Étaler les paliers d'imposition

Au cours des 30 dernières années, la droite économique a poussé les pouvoirs publics à diminuer le nombre de paliers d'imposition et à accorder d'importantes baisses d'impôts. Ce glissement vers un système fiscal de moins en moins progressif a invariablement avantagé les hauts revenus et causé une accentuation indéniable des écarts de richesse. Il faut renverser cette tendance.

En ce moment, il n'y a que quatre paliers d'imposition et la transition entre ceux-ci est abrupte. Nous proposons à la commission Godbout de les étaler davantage pour une distribution plus équitable du fardeau fiscal. Ces revenus supplémentaires permettraient de réduire l'impôt de ceux qui gagnent moins de 60 000$, soit la majorité des Québécois.

Distribuer la richesse entre entreprises et particuliers

Il y a un énorme déséquilibre entre le fardeau fiscal des particuliers et celui des entreprises. Des 78 milliards de revenus autonomes du gouvernement du Québec en 2014, 80% de ceux-ci proviendront essentiellement des particuliers.

Les grandes sociétés forment 1,5% des entreprises québécoises, mais réalisent 85% de leurs bénéfices totaux. Elles ont réussi à s'en tirer avec 10 fois moins d'impôt direct que les particuliers et un fardeau fiscal huit fois moins élevé en proportion de leurs revenus.

Pourquoi? D'abord, parce que la grande majorité de ces grandes entreprises réussissent à délocaliser une partie de leurs revenus tirés du Québec vers des juridictions complaisantes. Au final, moins de 30% de leurs revenus sont imposables au Québec.

De plus, 133 mesures fiscales permettent aux grandes entreprises de mettre leur revenu à l'abri de l'impôt en toute légalité ou d'obtenir des crédits d'impôt remboursables. Nous proposons à la commission Godbout de faire le ménage et de plafonner leurs montants.

Les particuliers payent donc beaucoup plus de taxes et d'impôts que leur part de revenu dans l'économie du Québec. Une correction de quelques points de ce déséquilibre rapporterait au gouvernement plusieurs milliards de dollars par année. Cela rétablirait son équilibre budgétaire plus efficacement que l'austérité, tout «en assurant une redistribution équitable de la richesse», tel que le souhaite M. Godbout.