C'est faux de dire que la participation électorale chute dans son ensemble. Lors des élections fédérales de 2011, le taux de participation chez les Canadiens de 65 à 74 ans était de 75% et de 71% pour les 55 à 64 ans. La participation de cette cohorte générationnelle n'a pas vraiment changé en 50 ans.

Le coeur du problème, ce sont les jeunes adultes. Les 18-24 ans ont voté à seulement 38,8% et les 30-34 ne firent guère mieux, avec 45,5%. Alors que la génération Y, le «echo boom», a un poids démographique énorme - soit près d'un électeur sur trois - , nous sommes timides quand vient le temps de s'approprier notre part de la démocratie.

Qu'en est-il des élections provinciales? On a touché le fond du baril au Québec en 2008 avec 36,2% de participation chez les 18-24 ans. Par contre, en 2012, le printemps érable et les enjeux de la campagne ont fait bondir leur taux de participation à 62,1%.

Il faut se demander ce que nous ferons cette fois-ci. Démographiquement, ça serait fou de rater l'occasion. La dernière fois que les jeunes ont eu un aussi grand pouvoir démographique fut durant les années 70!

Les conséquences de ne pas voter

Avant de se demander ce que nous pourrions gagner à voter, comme jeunes, pensons à ce que nous pourrions perdre à ne pas voter. Au-delà de notre part du pouvoir démographique et politique, nous abandonnerions quelque chose de bien plus important: le privilège de se faire courtiser par les élus. Plus notre groupe d'âge se mobilisera à voter, plus les discours des élus devront évoluer dans le sens de nos valeurs collectives générationnelles, comme ce fut le cas lorsque les baby-boomers atteignirent l'âge adulte.

Le véritable danger de ne pas voter est à plus long terme. Il n'est pas de perdre la place que nous occupons dans la démocratie, mais la place que la démocratie occupe dans notre société. Le vote est une habitude que l'on prend au début de sa vie adulte et que l'on conserve durant toute son existence. Des études démontrent que ceux qui ne votent pas lors des deux premières élections après avoir obtenu leur droit de vote ont tendance à ne pas voter le reste de leur vie.

Lorsque les 55 ans et plus avaient 18 ans, ils votaient à des taux de 70 à 75%. Et ils en ont gardé l'habitude. Quel sera donc le taux de participation aux élections dans quelques décennies si ma génération garde elle aussi ses habitudes? Ce serait donc nous qui aurions donné le coup de grâce à une démocratie déjà affaiblie?

Nous avons le choix. Soit affaiblir la démocratie ou la renforcir. Certains diront qu'elle est déjà perdue. Ces gens manquent d'imagination. Je choisis plutôt l'optimisme. Un optimisme qui vient du fait que nous avons la masse critique pour non seulement nous imaginer le Québec de demain, mais nous l'octroyer.

Lorsqu'une bulle démographique vote en masse, elle peut entraîner de grandes innovations politiques, définir des consensus qui transcendent la partisanerie. Au Québec, la protection de la langue française et la nationalisation de l'électricité découlent de politiques à la fois libérales et péquistes, fruits de la génération de nos parents. L'universalisation des droits civiques et de l'égalité devant la loi sont d'autres mesures appartenant à l'ensemble des partis politiques.

Nous pouvons atteindre de tels consensus à l'aide d'une diversité de tactiques: pétitions, textes d'opinion, manifestations, poursuites judiciaires. Mais il ne faut pas oublier qu'avant de croquer dans la pomme, il faudra miser sur notre levier le plus direct pour l'atteindre: le vote, la prise en charge de l'État, la responsabilisation d'une génération montante.