Quel est l'enjeu principal des prochaines élections au Québec? Je dirais que c'est le «corporatisme d'État», c'est-à-dire, l'État au service de lui-même ou des groupes d'intérêts qui le contrôlent directement ou indirectement.

Qui détient ce contrôle actuellement, et ce, peu importe le parti politique au pouvoir? Ce sont les corporatistes qui se sont développés comme des parasites et dont le premier réflexe est de détourner l'intérêt public au profit de leur propre intérêt. Qui sont-ils? Il est facile de blâmer les syndicats de fonctionnaires, bien sûr, mais n'oublions pas les fédérations de médecins, qui accaparent une plus grande partie des nouvelles dépenses de l'État en santé, et ce, souvent au détriment d'une plus grande accessibilité ou productivité.

Il y a aussi le patronat québécois qui est devenu, avec le temps, dépendant de plus en plus des subventions de l'État, dont il blâme du même souffle l'excès de dépenses. Pourtant, le Québec est la province qui dépense le plus en subventions et aides de toutes sortes pour les entreprises. La vache à lait de l'État sert aussi les entreprises informatiques ou pharmaceutiques avec de généreux programmes de dépenses, sans contrôle véritable des coûts, comme le révèle d'année en année le rapport du Vérificateur général du Québec.

L'indépendance de l'État

L'enjeu des prochaines élections, c'est donc l'indépendance de l'État québécois face aux intérêts corporatistes et à la culture parasitaire mise en place au fil des 50 dernières années. Il faut mettre fin à la culture corporatiste «des droits acquis» qui permettent à certains groupes de prendre en otage l'État québécois. Contrairement à ce que l'ont peut croire, l'État n'est pas neutre; il sert parfois de chasse gardée au profit d'une minorité, comme ce fut le cas dans les contrats publics avec des entreprises de construction, comme l'a démontré la commission Charbonneau.

Si nous voulons préserver nos services publics de façon à maintenir leur accessibilité pour une majorité de la population, il faut mettre fin à la culture et aux pratiques corporatistes qui amènent le cloisonnement inutile des décisions au sein de l'État québécois. L'enjeu des prochaines élections, c'est la modernisation des services publics, vers une plus grande efficacité mettant fin au gaspillage de fonds publics, au dédoublement des fonctions, à la bureaucratie inutile et paralysante et à la surprotection d'une minorité de gestionnaires peu imputables et/ou d'une compétence douteuse.

Pour y parvenir, il faudra former une élite de nouveaux gestionnaires pour «désétatiser» la culture corporatiste au sein de l'appareil de l'État, et ce, en partenariat avec une nouvelle génération de politiciens aguerris et intègres. C'est une grosse commande, je le sais, mais on ne peut plus exiger des citoyens de payer davantage de taxes et d'impôts, sachant que l'État québécois est incapable de bien gérer les fonds publics qui lui sont confiés, tout en étant à la merci de groupes qui ne défendent que leurs intérêts particuliers.