Voici une situation fictive, mais qui pourrait devenir de plus en plus fréquente dans les années à venir. On vous donne le choix entre deux professionnelles de la santé. Toutes les deux sont très compétentes. L'une est accueillante et empathique. L'autre est reconnue pour ses lacunes au niveau des relations humaines. Laquelle choisiriez-vous? Et si je vous disais que la professionnelle empathique porte un voile, cela ferait-il une différence?

Dimanche dernier, à Tout le monde en parle, le ministre de la Santé, Réjean Hébert, a déclaré qu'il se soucie tout premièrement des usagers. Il veut que les usagers se sentent en confiance en présence des professionnels de la santé. Il croit que la meilleure façon d'y arriver est de faire en sorte que ceux-ci n'affichent pas leur croyance religieuse.

M. Hébert n'a pas rappelé qu'avec notre population vieillissante, le Québec aura besoin de plus en plus de personnes immigrantes pour occuper tous les postes inoccupés qui ne pourront être comblés par une jeunesse trop peu nombreuse, dans le domaine de la santé entre autres. Je pense notamment aux aidantes qui oeuvreront auprès des personnes âgées.

Comment allons-nous arriver à avoir suffisamment de travailleurs de la santé? Jusqu'où sommes-nous prêts à aller afin que nos personnes âgées se sentent «en confiance» avec le personnel soignant? Faudra-t-il demander à une personne de nationalité chinoise, arabe ou grecque de changer son nom de famille afin que celui-ci soit plus facile à prononcer? En arriverons-nous à exiger des immigrants qu'ils parlent un français sans accent, faisant en sorte que nos aînés se sentent plus «en confiance» ? Jusqu'où la société québécoise est-elle prête à aller pour continuer à se sentir «en confiance» ?

Pourtant, j'imagine très bien une société en mesure d'accueillir ses nouveaux arrivants avec l'ouverture et la chaleur nécessaires à son développement harmonieux. Est-ce en empêchant des femmes qui portent le voile de travailler dans le secteur public, est-ce en les empêchant d'être autonomes financièrement, que nous nous sentirons davantage une société fière et épanouie?

Je crois que la vraie liberté pour les femmes comme pour la société se mesure en fonction du niveau de confiance en ses propres capacités, en ses propres valeurs, non pas en les imposant, mais en accueillant tous ceux et celles qui désirent se joindre à nous, vivre avec nous.

Ayant vécu et travaillé comme travailleuse sociale dans d'autres pays et d'autres provinces (New York, le Cameroun, l'Ontario entre autres), je suis convaincue que l'harmonie et le respect, au Québec, passeront par l'ouverture et l'éducation. Alors, tout sera possible.