Il y a quelques jours, un média de Montréal déplorait la baisse de fréquentation des salles de spectacles, laissant entendre qu'elles pourraient souffrir du manque d'accessibilité de la métropole. Quelle découverte! Malheureusement, il en est ainsi des autres facettes de l'économie montréalaise.

Selon Michel Leblanc, président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, il y a «une perte d'achalandage de 15 à 20% des commerçants à cause de l'absence des banlieusards». Seraient-ils trop dégoûtés des inconvénients de la circulation de Montréal pour y revenir magasiner ou voir un spectacle en fin de semaine? Or, 20% du chiffre d'affaires, c'est suffisant pour faire la différence entre prospérité et abandon des affaires.

Plusieurs entreprises du centre-ville éprouvent déjà des difficultés à recruter des employés qui ne veulent rien entendre de perdre deux heures et plus par jour dans les embouteillages, en plus de devoir sacrifier 5000$ de revenus nets en frais de stationnement. Or, si la technologie permet aux entreprises de délocaliser leurs services en Asie, comment Montréal peut-il faire compétition aux banlieues?

On développe un quartier des spectacles sans ajouter substantiellement des espaces de stationnement, comme s'il s'agissait d'un équipement de nature paroissial. Nos verts-intellos présument-ils qu'après le spectacle, un couple en tenue de soirée retournera chez lui en métro et en autobus, à 23 heures, jusqu'à St-Bruno ou Blainville?

On circule à Montréal sous la menace constante de policiers forcés d'atteindre un «quota de tickets» pour répondre à l'objectif annuel de 180 millions de dollars en contraventions. Jamais les policiers n'auraient dû s'abaisser à ce «taxage», mot juste pour un prélèvement annuel moyen coercitif de 60$/an/personne de la région!

Encore récemment, un restaurateur de la rue Duluth accusait la police de Montréal, et non les gangs de rue, d'avoir vidé cette artère de ses restaurants. 

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Avec une petite population de 1,7 million d'habitants, Montréal se classait déjà en 2010 comme troisième ville la plus embouteillée en Amérique du Nord. Et on nous annonce que le pire est à venir avec la réfection de l'échangeur Turcot, du pont Champlain, du tunnel Lafontaine... auxquelles s'ajoutent les nombreuses et longues fermetures imprévues du pont Mercier.

Après plus de 40 ans de tergiversations, il n'y a toujours rien de fait sur la rue Notre-Dame; une vision bornée, paroissiale encore une fois, propose encore et toujours une paisible rue de quartier encombrée de bacs à fleurs sur une artère qui dessert pourtant le septième plus important port d'Amérique du Nord.

On se berne en présumant que la quasi-totalité des besoins d'une population peuvent être satisfaits par le transport en commun, ce gouffre sans fond livré en otage aux syndicats, avec un métro qui dépasse une moyenne annuelle de 850 pannes. Les usagers le considèrent déjà dispendieux, même en en faisant payer par d'autres 73% du coût réel. Et on voudrait en rajouter! Des études démontrent que le métro ne pourra jamais répondre aux besoins spécifiques de plus de 20 à 25% des travailleurs, même en investissant les 23 milliards estimés en immobilisations. Ne devrait-on pas plutôt investir la moitié de ces 23 milliards dans des ponts additionnels qui faciliteraient tout autant le transport en commun?

Ce n'est pas non plus en ajoutant un péage sur les ponts ou en gelant le développement des banlieues que l'on provoquera l'épanouissement de la métropole.

Devant ce manque de vision des Montréalais sur la nécessité d'une métropole de se faire d'abord accessible - manque de vision confirmé par le fait qu'aucun candidat à la mairie ne soulève la question -, on comprendra que les banlieues n'ont d'autre choix que de s'organiser et de s'équiper.