La situation des langues en Amérique du Nord n'est pas du tout comparable à celle en Europe. En Amérique, au nord du Rio Grande, l'anglais est la langue usuelle de 98% de la population, alors qu'aucune langue usuelle n'est majoritaire en Europe.

De plus, en Europe, chaque culture linguistique protège sa langue dans les services publics offerts à l'intérieur de son pays, ou de son territoire dans le cas de la Wallonie, la Flandre, les quatre régions linguistiques de la Suisse, la Catalogne, le pays basque, l'Écosse...

En Amérique du Nord, la langue française va devenir une langue morte assez rapidement si elle n'est pas obligatoirement utilisée au travail et dans les services publics au Québec, entre résidents du Québec. Une telle exigence existe partout en Europe comme aux États-Unis pour la langue du pays ou du territoire, selon le cas. Le Québec n'agit pas différemment de ces autres pays ou territoires.

À l'intérieur du Canada, le Québec ne peut pas encourager le bilinguisme dans les deux langues officielles du pays si les autres provinces ne font pas de même, sous peine de voir la langue française disparaître.

Évidemment, une fois la langue française protégée au Québec et au Canada, il n'y a aucun problème à encourager les Québécois à apprendre à parler, lire et écrire au moins deux langues, et idéalement plus. D'ailleurs, comme M. Pound l'écrit, il n'y a qu'en Amérique du Nord, mais anglophone seulement, où on considère que parler une seule langue passablement bien est une grande réussite.

Au Québec, les francophones ont toujours eu un talent inné pour apprendre les autres langues. L'exploration par les nations européennes de la nouvelle Amérique, au nord du Rio Grande et dans les Antilles, a largement bénéficié des connaissances des francophones qui avaient appris les autres langues des peuples conquérants et celles des peuples autochtones.

Depuis l'élaboration d'un système public d'éducation au Québec au début des années 1960, en deux générations, les francophones ont pu améliorer leur langue française et ajouter deux autres langues. En général, la génération de mes parents ne parlait que le français avec une instruction de niveau primaire ou secondaire, ma génération des baby-boomers a ajouté l'anglais à son bagage de connaissances et la génération de mes enfants est maintenant trilingue avec l'ajout principalement de l'espagnol, pour un total de trois langues dans le top cinq des langues parlées par le plus de gens au monde.

Je suis persuadé que mes petits-enfants et leur génération au Québec seront polyglottes en ajoutant une quatrième langue, tout en conservant leur français, en autant que cette langue soit protégée au Québec.

Je suis donc d'accord avec vous pour un Québec ouvert sur le monde. Mais, dans le contexte actuel en Amérique du Nord et surtout dans le reste du Canada unilingue anglais hormis l'Acadie, l'ouverture du Québec sur le monde doit absolument être accompagnée de politiques de protection de la langue française à l'intérieur de son territoire, tant au travail que dans les services publics offerts entre résidents du Québec.

Quant à l'ouverture sur le monde, avec les résidents d'ailleurs, cela devrait se faire dans la langue du client, soit en français lorsque nous sommes clients, et dans l'autre langue lorsque nous sommes fournisseurs. En absence d'une relation client-fournisseur, chacun devrait pouvoir parler sa propre langue, quitte à ce que la personne unilingue se dote des services d'un interprète.