Je ne suis pas spécialiste du droit familial, ni sociologue ni anthropologue, je suis simplement une femme qui a réussi professionnellement et qui a élevé trois enfants. La position que vous défendez sur les conjoints de fait m'apparaît tout droit sortie des années 70, et, selon moi, a pour effet d'alimenter et de justifier le rôle de la femme vulnérable et soumise économiquement. Une telle position n'a plus sa place en 2013.

Dans les années 70 et auparavant, les femmes qui voulaient élever une famille n'avaient presque pas d'autre choix que de rester à la maison pour le faire. Les garderies étaient quasi inexistantes et très coûteuses de surcroît. De plus, sortir du rôle social qu'on leur réservait attirait inexorablement l'opprobre populaire. Nous ne sommes plus là en 2013 et je salue au passage toutes les pionnières qui ont contribué à l'évolution de notre société.

Mais voyez-vous, en 2013, les garderies sont omniprésentes et accessibles à coût raisonnable. La norme d'aujourd'hui est d'occuper le marché du travail, homme ou femme. De plus, les femmes sont de plus en plus instruites, même davantage que les hommes, et occupent de plus en plus des positions importantes dans les entreprises et la société.

Le rôle social qu'on réserve aux femmes au regard de la famille tend également à changer, mais plus lentement cependant. Les hommes prennent beaucoup plus de place dans l'éducation des enfants et dans le fonctionnement du foyer, mais les rôles sont loin d'être inversés dans les cas où la femme occupe un emploi plus rémunérateur que l'homme. Dans ces cas, la femme continue à assumer une grande part de son rôle familial, EN PLUS de mettre les bouchées doubles pour son travail. Cette situation est bien différente de ce qui était vécu dans les années 70, où les tâches professionnelles et familiales étaient clairement divisées entre l'homme et la femme. Vous comprendrez que dans un tel cas, la femme serait pénalisée sur deux plans : avoir assumé un double rôle professionnel et familial durant son union (la « superwoman »), et payer en plus pour un conjoint qui en aurait fait moins au terme de l'union.

Contrairement à ce que nos mères et grand-mères ont vécu, où il n'y avait qu'un seul modèle possible, il existe aujourd'hui autant de variantes qu'il y a de couples. C'est justement pour cette raison qu'en 2013, on doit laisser le choix au couple de décider le modèle qui lui convient le mieux. Vouloir imposer un modèle statique et rétrograde aurait malheureusement pour conséquence de pénaliser des femmes qui auront voulu se sortir du rôle traditionnel qu'on leur réserve.