En annonçant leur retrait de leurs fonctions électives et de la vie publique, Gérald Tremblay et Gilles Vaillancourt nous rappellent qu'en politique, il faut savoir arriver et... savoir quitter. Idéalement, par la porte avant.

Malgré le cynisme des citoyens à l'égard de leurs élus, la très grande majorité des femmes et des hommes qui choisissent de donner une partie de leur vie à leurs concitoyens le font pour une seule raison: servir l'intérêt collectif.

Si les entrées en politique se ressemblent souvent (une conférence de presse où le candidat est entouré de ses partisans), les façons d'en sortir varient énormément. Rappel de quelques départs marquants.

Pierre-Eliott Trudeau. Personnage spectaculaire, le premier ministre du Canada fait d'abord connaître son départ de la vie politique en 1979; il est revenu quelques mois plus tard lorsque le gouvernement minoritaire de Joe Clark a été renversé. M. Trudeau a déclaré qu'il a pris sa décision de partir en faisant une marche, par un soir de tempête de neige. Aucun photographe ou caméraman n'a capté les images et, pourtant, beaucoup de gens âgés de 50 ans et plus ont encore cette scène en mémoire!

René Lévesque. Pourtant adulé durant presque toute sa carrière politique, le premier ministre du Québec était un homme brisé lorsqu'il a quitté la politique, le 20 juin 1985. Ce jour-là, l'Assemblée nationale a célébré ses 25 années de vie politique. Vers 23 heures - après l'heure de tombée des journaux et la fin des bulletins de nouvelles - il a envoyé une simple lettre à la vice-présidente du PQ annonçant sa démission. Une sortie aussi triste que discrète pour un élu jusqu'alors omniprésent.

Jean Drapeau. En 1986, Jean Drapeau a annoncé son départ de «sa» ville, la voix étranglée par l'émotion. Fier de ses nombreuses réalisations qu'il a présentées sous leur meilleur jour, M. Drapeau est parti parce que ses capacités physiques l'empêchaient de solliciter un nouveau mandat. Un départ marqué par la dignité.

Jacques Parizeau. Ce n'est pas l'annonce officielle de son départ, en 1995, que les Québécois ont retenue. C'est plutôt sa déclaration malheureuse de la veille: une seule phrase. Cette sortie ratée est d'autant plus triste qu'on ne compte plus ses réalisations marquantes.

Mario Dumont et Gilles Duceppe. En 2008 et 2011, lorsque l'Action démocratique du Québec et le Bloc québécois se sont retrouvés avec chacun une poignée de députés, les deux chefs ont annoncé leur départ le soir même de leur défaite respective. Leurs sorties élégantes ont sans doute contribué à ce qu'ils demeurent des acteurs de l'actualité des plus respectés.

Gérald Tremblay et Gilles Vaillancourt. Bien que les circonstances les ayant poussés à quitter la mairie de Montréal et de Laval soient différentes, tous deux viennent de sortir par la porte arrière. Un peu plus et nous les aurions vus la tête cachée dans leur manteau, comme c'est le cas lorsqu'il y a des arrestations.

Reconnus depuis leur jeunesse comme des leaders et des visionnaires, jamais ils n'auraient imaginé quitter ainsi la vie publique, à près de 70 ans. Sans émotion apparente, ils devaient être néanmoins sonnés! Ils ont lu des textes de démission rédigés par leurs conseillers.

M. Tremblay était dans un décor soigné, le hall de l'Hôtel de Ville. L'éclairage avait été calibré et M. Tremblay, maquillé.

M. Vaillancourt a choisi la salle du conseil municipal, dans laquelle il est entré d'un bon pas. Il a tourné les talons aussi rapidement.

Tous deux n'ont répondu à aucune question des journalistes. Et il ne faut pas s'attendre à les voir défiler à Tout le monde en parle!