L'État-providence québécois est-il dépassé, a-t-il fait son temps? À moins qu'il ne soit dépassé par l'incapacité où il se trouve présentement de satisfaire tous les besoins des citoyens dans des domaines où il veut garder jalousement le monopole. Peu importe le sens à donner au terme «dépassé», l'État-providence doit se remettre en question.

La social-démocratie et l'État-providence sont indissociables. Par souci de justice et pour assurer les meilleurs services aux citoyens, l'État privilégie la centralisation. Et il a besoin d'une bureaucratie imposante. Les exemples québécois sont frappants.

Pour assurer la garde des enfants en bas âge, l'État a créé un modèle unique en laissant une place bien mince aux initiatives privées. Plutôt que de concentrer les ressources dans les milieux défavorisés où les besoins sont criants, on a imposé un modèle identique partout, même là où les citoyens s'étaient déjà très bien organisés. Cela par souci de justice sociale avec un résultat pourtant paradoxal: des familles aisées profitent d'un service au rabais pendant que, dans les milieux défavorisés, plusieurs mères célibataires préfèrent s'occuper elles-mêmes de leurs enfants en bénéficiant de l'aide sociale.

Puis, devant le peu de succès de la formule en milieux défavorisés pour bien préparer les enfants à l'école, même quand ils fréquentent les CPE, et peut-être ainsi lutter contre le décrochage scolaire, voici que l'on veut instaurer à grands frais des maternelles à 4 ans dans ces milieux. Et le pire des paradoxes, c'est que les CPE, implantés par un État très préoccupé par la justice sociale, ne sont même pas accessibles à tous! On prétend qu'une demande insoupçonnée dépasse l'offre de service alors qu'au fond on n'avait peut-être pas les moyens d'offrir ce service unique et coûteux pour la collectivité.

Situation analogue dans le service de santé. On tolère le privé comme un mal nécessaire, mais on est incapable d'offrir un médecin de famille à chaque citoyen. Par entêtement idéologique, on interdit même la possibilité d'assurer à ceux qui n'ont pas le choix de recourir aux médecins désengagés. Et que dire de la bureaucratie de notre système de santé centralisé à outrance!

Il faut le constater, l'État-providence québécois dépense beaucoup pour nourrir une lourde bureaucratie et mettre en place des services qu'il ne peut même pas offrir à tous. Et il est incapable de faire respecter certaines lois pourtant fort généreuses.