Les médecins que je côtoie sont Marocains, Algériens ou Québécois, bien sûr. Il serait trop long de nommer l'origine de toutes les infirmières que j'ai rencontrées dans ma vie. Mon pharmacien favori était d'origine chinoise. Mon agent d'assurances est d'origine tunisienne. Je travaille en science et j'ai travaillé avec des gens d'origine indienne, pakistanaise, iranienne, argentine, grecque et haïtienne.

Au restaurant et dans les magasins, je rencontre des Québécois d'origines variées. Pourtant, lorsque je m'assois devant mon téléviseur, je ne retrouve pas cette diversité.

La dernière fois que j'ai regardé un gala, je ne voyais que des Blancs dans la salle. J'avais l'impression de regarder un congrès républicain. Dans les téléromans, les «non-Blancs» ont la plupart du temps un rôle secondaire ou de figurant. Jamais de rôle principal. On ne les voit que très peu dans les jeux-questionnaires et les talk-shows. Bien sûr, il y a quelques exceptions (des Kiwis et des hommes, District V, par exemple). Pas besoin de tout regarder ce qui se fait en télévision. Regardez une heure de télévision et observez les acteurs, animateurs et chroniqueurs qui y sont annoncés. Vous verrez. C'est très monochrome. La galère, Mauvais Karma et Unité 9 sont trois téléromans où 13 femmes tiennent les rôles principaux. Combien sont d'une autre couleur ou d'une autre ethnie? Aucune. Même pas un faible 1%. Je serais curieuse de savoir si c'est aussi blanc chez les coiffeurs, maquilleurs, habilleurs, scripteurs, recherchistes, auteurs et scénaristes. Même au Téléjournal, lorsqu'on fait des vox pop, on questionne presque exclusivement des Blancs. Le théâtre m'apparaît encore plus fermé. Seul le monde de l'humour semble plus ouvert (Sugar Sammy, Anthony Kavanagh, Eddy King, Rachid Badouri).

Si je ne me trompe, tous les journalistes et chroniqueurs photographiés dans ce journal sont blancs (sauf Richard Hétu). Même chose pour vos nouveaux collaborateurs de lettres d'opinion (Jocelyn Coulon, Martin Coiteux, Claudette Carbonneau, Gaétan Frigon et Mélanie Dugré). Il semble que ce soit la même chose dans le journal concurrent, si on se fie à la dernière publicité mettant en vedette leurs chroniqueurs. Pourquoi est-ce ainsi, puisque le reste de la société s'est diversifié?

Ne serait-ce pas un des mandats de la télévision publique d'oser présenter un téléroman dont les acteurs ou les actrices principaux seraient des non-Blancs (svp, pas seulement Normand Brathwaite)? Ou au moins, une série écrite par un auteur d'une autre origine?

Ici, je n'espère pas la parité. Juste un peu plus de représentation. Et surtout pas un (e) Noir (e) qui joue un rôle de Noir (e), mais bien quelqu'un qui joue un rôle de père ou de mère, d'ami ou d'amoureux. Même votre journal ne pourrait que s'en porter mieux en nous présentant d'autres points de vue sur l'actualité.

Ah oui, j'oubliais de spécifier. Je suis ce qu'on appelle une «pure laine». Comme mon conjoint, mes enfants, mes soeurs, mon frère et mes beaux-frères. Si j'étais d'origine étrangère, je suis presque sûre que je ne regarderais pas la télévision québécoise puisque je ne m'y reconnaîtrais pas. Je regarderais CBC, CTV ou un réseau américain (puisqu'ils sont plus multiethniques) et je m'angliciserais.

Je crois que l'avenir du français et de notre culture passe par l'inclusion. Le monde culturel et journalistique est-il en train de creuser notre propre tombe en ne s'ouvrant pas assez sur la diversité?