Le nouveau ministre de la Sécurité publique, Stéphane Bergeron, fait face à plusieurs défis majeurs.

D'abord, il doit s'assurer que la métropole du Québec - qui subit le tiers de la criminalité, mais comprend le quart de sa population - dispose du financement nécessaire, notamment pour contrer le crime organisé et son infiltration dans l'économie légale.

On sait que Montréal est parasité par des réseaux interlopes solides auxquels il est vital de porter des coups réguliers. On ne réussira probablement jamais à éradiquer le crime organisé, mais l'empêcher de trop prospérer demande des enquêtes continuelles et des moyens importants. Lorsqu'on voit l'impact du crime organisé sur le coût des contrats publics, on comprend qu'il s'agit d'un investissement hautement rentable.

En termes de sécurité publique, Montréal est une ville plus intense et plus complexe que toute autre ville au Québec et cela doit se refléter dans les moyens donnés au SPVM pour agir.

Les policiers de Montréal ont par ailleurs hérité d'un certain nombre de problématiques sociales; que l'on pense à l'itinérance ou aux problèmes de santé mentale. À défaut d'investir pour éviter que des problèmes de santé publique ne dégénèrent en problèmes de sécurité publique, c'est dans les ressources policières spécialisées qu'il sera nécessaire de mettre davantage de ressources.

Ensuite, le ministre devra résister à la mode qui consiste à demander plus de comptes à ceux qui ont la tâche de faire respecter la loi qu'à ceux qui la bafouent.

Certes, nous sommes habitués de rendre des comptes et nous trouvons ça normal: les sanctions disciplinaires vont jusqu'à la destitution, nous sommes sujets aux plaintes en déontologie, aux poursuites civiles, aux plaintes au criminel, parfois aux enquêtes publiques du coroner.

À la suite des manifestations étudiantes, certains se sont plaints du travail des policiers. Nous avions une tâche colossale sur les épaules: protéger la liberté d'expression des manifestants et le droit des citoyens à vivre en sécurité et à ne pas voir l'ordre public s'effondrer. Rappelons que 70 policiers ont été blessés lors de ces manifestations, dont une trentaine ont dû subir un arrêt de travail, notamment à la suite de pluies de projectiles contondants.

Si certains demandent une enquête publique sur les agissements de la police lors des manifestations étudiantes, la population en général estime que les policiers ont bien fait leur travail. Nous ne sentons aucun appétit pour une telle enquête. Toutefois, si elle devait avoir lieu, on devrait exiger qu'elle porte également sur la relation entre certaines organisations militantes et la violence qui s'est exprimée dans les rues. Une violence que nos membres ont gérée avec brio, considérant le volume inouï d'interventions et le nombre immense de manifestants.

Enfin, le financement des services policiers au Québec souffre d'un net penchant en faveur de la SQ. Les villes où la SQ offre les services de base touchent 240 millions de dollars en subventions pour le seul motif que l'uniforme de leurs policiers est vert.

Cette iniquité envers les contribuables ne bénéficiant pas de ce financement (Montréal, Québec, Longueuil, Laval, Gatineau...), le ministre Bergeron l'avait reconnue lorsqu'il était membre de l'opposition officielle. Il s'était également montré préoccupé par l'abandon de l'équilibre des effectifs entre corps policiers, car depuis plusieurs années, la SQ avale des corps de police municipaux. Ce phénomène mine l'objectif de répartir de façon balancée les effectifs policiers pour éviter trop de concentration.