Une lettre intitulée «Mouvement étudiant et répression policière - Pour une commission d'enquête publique» a été rendue publique la semaine dernière. Elle est maintenant endossée par environ 180 professeurs et chargés de cours de diverses disciplines et de différentes universités.

Nous y demandons la tenue d'une commission d'enquête sur l'ensemble des opérations policières ayant eu lieu au Québec pendant toute la grève étudiante. Deux éditorialistes de La Presse, André Pratte et Mario Roy, ont jugé bon de réagir à cette demande. Dans leurs éditoriaux respectifs, ils affirment qu'une telle commission devrait enquêter sur les deux camps, à savoir la police, mais aussi le mouvement étudiant.

Le mouvement étudiant fait déjà l'objet d'une enquête et doit répondre de ses actes. Il y a eu environ 3500 arrestations. Il y aura donc des milliers de procès qui fileront sur plusieurs années: des preuves seront déposées, des témoins seront appelés à la barre, des policiers livreront leur version des faits, des peines seront sans doute infligées.

C'est parce que le camp étudiant doit déjà répondre de ses actes que nous demandons une commission d'enquête portant spécifiquement sur la police.

S'il y a commission, les représentants de la police sauront bien justifier ses bavures et sa brutalité (épuisement des troupes, violence des manifestants, etc.), désigner la menace à laquelle elle a fait face (les anarchistes, le Black Bloc, les «terroristes» fumigénistes, les syndicats, etc.) et exiger plus de ressources (meilleure formation, plus d'équipement, etc.).

Mais à tout le moins, la police devra aussi répondre de ses actes, et peut-être admettre des erreurs graves, en termes de pratiques d'intervention et du respect des droits fondamentaux. La police pourra aussi recevoir des recommandations lui permettant de s'améliorer.

Dans un État libéral, la police doit avoir une image irréprochable et ne pas sembler jouir d'une impunité formelle ou informelle.

La grève est terminée, environ 3500 personnes font face à des accusations, et il y a eu plusieurs blessures graves du côté des manifestants (crânes, jambes et bras fracturés, dents éclatées, deux yeux perdus). La police doit aussi répondre de ses actes.