Depuis plusieurs jours, je rumine la remise des méritas des maternelles à l'école de mon fils de 6 ans. Fière, comme toute mère peut l'être de ses enfants, je me suis rendue à cette invitation formelle de la directrice reçue un mois à l'avance. Cette cérémonie toute planifiée devait, pensais-je, féliciter tous ces enfants préscolaires d'avoir passé la première étape vers une vie scolaire remplie de contraintes, de hiérarchie et de division. Car ne nous le cachons pas, l'école, c'est non seulement un lieu d'apprentissage, mais également une microsociété qui reflète les réalités adultes la plupart du temps.

Je suis sûrement idéaliste, mais j'y allais vraiment pour encourager les jeunes de la classe de mon fils et je m'attendais à ce que tous ces élèves reçoivent un certificat symbolique. Or, quelle ne fut pas ma surprise de constater que seuls quatre élèves par classe recevaient un méritas pour bon comportement, bons efforts, bon travail ou autre. Quatre sur 20! Ils ont pour la plupart 6 ans, mais quelques-uns d'entre eux ont encore 5 ans. Bon, heureusement, deux autres ont reçu un méritas pour leur bonne condition physique, ce qui fait augmenter la proportion, mais quand même!

Non seulement ces élèves recevaient un méritas papier, mais ils avaient droit de choisir un cadeau flamboyant aux couleurs de l'été. Et ce, devant tous les autres élèves de maternelle. Mettez-vous un instant dans la peau des autres enfants, quelle déception! Je comprends que l'on veuille encourager les enfants ayant eu un bon comportement tout au long de l'année, mais j'y vois plusieurs problématiques d'ordre social. Le fait d'identifier les élèves méritants ostracise les plus faibles ou ceux ayant un problème comportemental. Le fait de récompenser des élèves dès la maternelle peut ralentir l'essor des élèves les plus forts. Et par-dessus tout, en agissant ainsi, l'autorité scolaire divise en deux catégories les enfants : les bons et les pas bons. Certains seront ainsi marqués pour le reste de leur cheminement scolaire dans cette école. Tout le corps professoral saura que tel élève fut méritant ou non. Tous les enfants le sauront également, ce qui peut éventuellement amener à l'intimidation. Et qu'arrivera-t-il aux élèves moyens? De quel côté seront-ils catégorisés?

De retour en classe, après la « cérémonie », plusieurs enfants pleuraient. L'enseignante a dû gérer cette crise hiérarchique, mais riche de son expérience, elle avait prévu le coup en préparant une pinata pour tous, afin de mieux faire passer la pilule. Je vous rappelle qu'ils sont en MATERNELLE, ne sont-ils pas trop jeunes pour vivre cela?