Cela fait 20 ans que j'enseigne l'histoire au secondaire et s'il est un sujet auquel j'ai consacré réflexion, temps et énergie au cours de ces années, c'est celui de l'éducation citoyenne de mes élèves.

Dès le début de ma carrière et jusqu'à aujourd'hui, j'ai cru qu'enseigner les fondements et les rouages de notre démocratie était une tâche justifiée et pertinente. Ai-je été naïf pendant toutes ces années en croyant que je faisais oeuvre utile en initiant mes jeunes de 16 ans à la démocratie québécoise et canadienne? Est-ce en vain qu'année après année, mes élèves ont, lors de voyages à Ottawa, assisté aux travaux de la Chambre des communes, que plusieurs d'entre eux ont pris part aux simulations parlementaires de l'Assemblée nationale à Québec et que des centaines d'adolescents de mon école ont participé à des simulations électorales? Était-ce vraiment utile que j'invite mon député à venir parler du fonctionnement de nos institutions démocratiques, de son travail de parlementaire et des enjeux de l'heure avec mes élèves? J'en doute depuis quelques semaines.

Les terribles images de Montréal rappelant ce qu'était Belfast il y a 35 ans m'ont profondément troublé. Au-delà de la question du partage des responsabilités entre le gouvernement et le mouvement étudiant dans la crise que nous vivons actuellement, c'est bien plus celle de savoir comment sortir de ce bien triste printemps québécois qui me préoccupe.

La seule réponse possible me semble être celle que je propose à mes élèves depuis 20 ans: l'implication de chacun dans la vie politique ainsi que l'exercice du droit de vote. Il est temps de faire converger les colères, les récriminations, les idées et les solutions là où elles trouveront un véritable écho, c'est-à-dire dans les partis politiques qui s'affronteront aux prochaines élections.

L'histoire contemporaine du Québec témoigne avec éloquence que c'est bien plus par les urnes que par la rue que les changements sociaux se produisent ici. Que tous ces gens, plutôt que de prendre part soir après soir à des manifestations devenues dangereuses et qui desservent leur cause, que tous ces gens, jeunes et moins jeunes, s'investissent en masse dans les partis politiques en prévision du prochain rendez-vous électoral qui est pour bientôt.

Je souhaite que le député Amir Khadir, plutôt que d'inviter à une réflexion sur la désobéissance civile, profite de la mobilisation présente pour mettre sur pied une armée de jeunes militants qui, au lieu de confronter les policiers, se mettront à frapper aux portes pour distribuer des tracts expliquant la position de Québec solidaire sur la question des droits de scolarité et plus largement sur le programme de cette formation politique.

Je souhaite que la chef du Parti québécois, Pauline Marois, et les membres de son caucus retirent leurs carrés rouges devenus, pour bien des Québécois, un synonyme de violence injustifiée et qu'ils les remplacent par de gros macarons du PQ en prévision des élections à venir. Que les jeunes, plutôt que de hurler leur haine du premier ministre et du gouvernement, prennent une carte de membre du Parti québécois et s'impliquent dans les associations de comtés.

Je souhaite que ceux qui appuient la politique du gouvernement fassent de même et assument et défendent leur point de vue en militant pour la réélection du PLQ ou encore pour que la CAQ forme le prochain gouvernement.

Je souhaite enfin que tous les citoyens du Québec, peu importe leurs opinions, se rendent massivement voter aux prochaines élections de sorte que je pourrai encore, dans les années à venir, faire preuve de conviction face à mes élèves lorsque je leur expliquerai que chez nous, c'est par l'implication pacifique des citoyens dans les instances politiques légitimes et par la participation au processus électoral que la démocratie se vit.